samedi 22 février 2014

La mobilisation est générale

La mobilisation est générale 

...Déclare  Mohamed Ali Laroui, porte-parole du ministère de l’Intérieur, à La Presse

Le terrorisme n’est pas seulement un fléau sécuritaire, mais aussi social et économique. Comment le combattre ? L’Etat est-il prêt à mettre en place une stratégie conséquente en tenant compte non seulement des problèmes de manque d’équipements et de logistique, mais aussi d’ordre idéologique et culturel ? Plus, existe-t-il une réelle volonté politique de lutte contre le terrorisme ?
A toutes ces questions, Mohamed Ali Laroui, porte-parole du ministère de l’Intérieur, apporte des réponses pratiques, claires, précises et chiffrées. Concernant les problèmes d’équipements et de la logistique, l’intervenant explique, chiffres à l’appui, «que dans la foulée de la révolution le ministère de l’Intérieur a vu ses équipements, en transport et infrastructure, partir en fumée. Aussi 1.800 voitures ont-elles été incendiées, 170 postes de police détruits ou incendiés. Nous avons donc besoin de moyens financiers importants afin de remplacer ce qui a été détruit, sans compter le matériel habituel à acquérir».
Mais qu’à cela ne tienne, il semble bien que le ministère de l’Intérieur est convaincu de la nécessité de mener une lutte sans merci contre le terrorisme auquel personne n’était préparé, ni l’Etat, ni les citoyens. C’est pourquoi son porte-parole assure «qu’une stratégie sécuritaire de lutte antiterrorisme est nécessaire certes, mais elle n’est guère suffisante, car elle devrait être soutenue par une stratégie idéologique, conceptuelle, éducative, sociale et cultuelle.
Ce qui demande la contribution de tous : partis, société civile, syndicats, médias, citoyens et l’ensemble des autres ministères».
Concernant maintenant les moyens techniques et scientifiques et les équipements, Mohamed Ali Laroui annonce l’acquisition par le ministère de 40.000 gilets pare-balles qui devraient arriver dans les prochains jours. Outre l’acquisition de véhicules et de voitures et les donations dans le cadre du partenariat avec les Etats-Unis, la Turquie, l’Allemagne, l’Italie et la France».
Et la volonté politique, existe-t-elle vraiment ?
«Cette question de volonté politique n’est pas de mon ressort, mais je peux vous assurer que la volonté sécuritaire existe et nous sommes tous mobilisés entre forces de sûreté intérieure, Garde nationale, policiers, douaniers, Protection civile et armée pour combattre le fléau du terrorisme», rassure M. Laroui.

Sept terroristes arrêtés
Concernant les questions d’actualité, le porte-parole du ministère de l’Intgérieur nous a appris que «les opérations de ratissage se poursuivent aux monts Selloum et Chaâmbi avec des opérations de bombardement ciblées par les unités de la sûreté et de la Garde nationale, en totale coopération avec l’Algérie. Sept individus ayant apporté des soutiens logistiques et alimentaires à la trentaine de terroristes retranchés au Chaâmbi ont été arrêtés». A la question de savoir si le niqab sera interdit, le porte-parole répond que «la loi sera appliquée et que personne n’est au-dessus de tout contrôle et que des mesures seront annoncées bientôt».
Quant aux 300 agents de police limogés après la révolution et qui sont actuellement en sit-in devant le ministère de l’Intérieur, il a été convenu que les dossiers de 70 d’entre eux seront étudiés au cas par cas, contrairement à ceux qui ont des affaires en justice, en attendant le jugement. Cette affaire est entre les mains des syndicats de la police.
Et l’affaire des nominations partisanes au sein du ministère, soulevées par certains partis de l’opposition, seront-elles révisées ?
«Cela est du ressort, en premier lieu, du ministre de l’Intérieur selon la nécessité et la marche du travail».


La lutte antiterrorisme en chiffres

– Acquisition de 40.000 gilets pare-balles.
– Des centaines de jihadistes en Syrie, 10 ont été arrêtés à leur retour au pays.
– Les dossiers de 70 agents de police parmi les 300 limogés sont à l’étude par les syndicats de la sûreté.
S.D.

ELECTIONS

Faudrait-il que Marzouki et Ben Jaâfar démissionnent ?
LA proposition invitant Ben Jaâfar et Marzouki à démissionner, s’ils ont l’intention d’être candidats à la prochaine présidentielle, provoque un chaud débat à l’hémicycle du Bardo
La proposition faite, mercredi dernier, par le constituant Mohamed Karim Krifa, membre de la commission de législation générale au sein de l’Assemblée nationale constituante (ANC), ayant trait à l’article 21, a suscité l’intérêt, voire une polémique. Le député d’Al Moubadara ayant proposé «l’empêchement des présidents de la République, Moncef Marzouki et de l’ANC, Mustapha Ben Jaâfar, sur la base de l’article 21 consacré aux interdits de candidature aux élections législatives». Le député a estimé que «leurs chances aux prochaines élections sont plus grandes, étant donné l’utilisation des moyens de l’Etat, entre transport, surveillance policière, outre qu’ils jouissent de leur statut actuel dans leurs déplacements à l’intérieur et à l’extérieur du pays».
Pour en savoir plus, nous  avons approché Mohamed Karim Krifa, qui nous a présenté tout un argumentaire : «Ecoutez, l’un des principes de la nomination du président du gouvernement actuel Mehdi Jomâa est qu’il ne peut, avec tout son gouvernement, se présenter aux prochaines élections législatives et/ou présidentielle. Par conséquent et en adéquation, les deux autres présidents ne peuvent se présenter aux prochaines élections s’ils ne démissionnent pas actuellement. Cela afin qu’il ne puissent pas mener une campagne électorale prématurée sur le dos du contribuable en utilisant les deniers publics et en exploitant leurs postes aux dépens de l’équité et de l’impartialité administrative. On ne peut accepter aujourd’hui ce qu’on a reproché hier à Ben Ali qui exploitait, selon son bon vouloir, toutes les institutions de l’Etat, y compris les médias.
Est-il normal que Mustapha Ben Jaâfar dédicace le «Destour» portant le logo d’Ettakatol ? Est-que la Constitution appartient uniquement à ce parti ? Ou est-ce normal qu’il se déplace à Jendouba dans une sorte de campagne électorale d’Ettakatol qui ne dit pas son nom, alors qu’il est président de l’ANC ? Idem pour le président provisoire Moncef Marzouki, également président d’honneur du CPR, qui a pioché dans des archives ne lui appartenant pas pour imprimer son «Livre noir» avec les derniers de l’Etat. Sachez qu’en France, lors de la dernière présidentielle, on a également reproché au candidat sortant Nicola Sarkozy d’avoir utilisé les moyens de l’Etat, mais toutes les dépenses qu’il a faites ont été évaluées et comptabilisées et son parti a dû rembourser 12 millions d’euros, soit 27 milliards de nos millimes. J’exigerai, donc, une évaluation et une restitutions des dépenses des campagnes électorales prématurées des deux présidents qui ont joui des avantages de leurs postes, ce qui porte un coup à l’équité et l’égalité des chances entre tous les candidats».

Garantir l’impartialité et l’égalité des chances

Interrogé sur la question, Samir Taïeb, porte-parole d’Al Massar, a, de son côté, relevé que «Mustapha Ben Jaâfar a déclaré qu’il allait mettre de l’ordre dans la maison Ettakatol. Et là il s’exprime en tant que président de son parti et c’est son  droit, mais alors qu’il quitte la présidence de l’ANC, s’il a l’intention de se représenter aux prochaines élections, afin de garantir l’objectivité et l’impartialité exigées. Nous n’avons aucun problème ni avec Ben Jaâfar ni avec Marzouki, mais pour des raisons de loyauté et d’éthique ils devraient démissionner s’ils comptent se porter candidats aux prochaines élections».
Mais ce n’est pas là l’avis de certains députés du CPR dont Samir Ben Amor qui a déclaré, mercredi dernier, sur Mosaïque FM, «que le député Karim Krifa parle des conditions de candidature à la présidentielle alors que nous discutons des  conditions de candidature aux législatives. Cela côté forme.
Côté contenu, le constituant a qualifié la proposition du député d’Al Moubadara «de bidaâ», une sorte d’invention, pour empêcher Marzouki et Ben Jaâfar de se présenter aux élections en raison de la  crainte notamment des chances importantes du président de la République aux prochaines élections, vu la confiance dont il jouit auprès du peuple. C’est pourquoi on veut l’empêcher de se porter candidat».
Or Mohamed Karim Krifa est catégorique : «Je ne parle ni des législatives ni de la présidentielle, mais de l’utilisation de la logistique  administrative de l’Etat non pas dans l’intérêt du peuple ou de l’Etat mais à des fins purement personnelles et électoralistes étroites anticipées».

Polémique sur la proposition d’interdiction de candidatures 

Par ailleurs, des députés de la Troïka dont Samir Ben Amor du CPR et Yamina Zoghlami d’Ennahdha, ainsi que Samia Abbou du Courant démocratique, ont présenté une proposition d’interdiction de candidature dans la loi électorale, en se basant sur l’article 15 du décret-loi n° 3 organisant les élections de l’ANC. Or, les interdictions sont contraires à l’esprit et à la lettre de la Constitution et touchent à l’essence même du droit des personnes. Selon l’article 49 du «Destour», les interdictions de candidatures ciblent les anciens dirigeants du régime de Ben Ali, ainsi que les anciens adhérents du RCD, comme l’avait stipulé l’article 15 du décret-loi n° 35 organisant les élections de l’ANC.
Or, la majorité des députés, tel Mohamed Karim Krifa du Parti initiative nationale et destourienne (Moubadara), trouve cette proposition «inconstitutionnelle». Pourquoi ? Explication du député : «Je me base sur des articles de la nouvelle Constitution, tel l’article 49 (chapitre droits et libertés fondamentaux), stipulant explicitement que les interdictions dans les lois ne doivent pas toucher à l’essence des droits, sachant que la candidature pour diriger le pays est un droit inaliénable pour tous les Tunisiens. Sachez maintenant que Zied Lâadhari, porte-parole d’Ennahdha a jugé que les propositions d’interdiction de candidatures «n’engagent que leurs auteurs».

Et l’instance de contrôle de la constitutionalité des lois ?
De plus, la question principale qui se pose concernant l’interdiction dans la loi électorale est la suivante : est-ce qu’il faut élaborer une loi électorale avant ou après l’instauration d’une instance pour contrôler la constitutionnalité, des lois ? Ce à quoi Mohamed Karim Krifa répond : «En se référant à l’alinéa 7 de l’article 149 de la Constitution dans le chapitre «les mesures transitoires» , on relève qu’il stipule  que l’ANC doit approuver dans un délai de 3 mois à partir de la date de la promulgation de la Constitution une loi organique qui a pour but l’instauration d’une instance provisoire dont la mission est le contrôle de la constitutionnalité des lois, soit au maximum le 25 avril en attendant la création de la Cour constitutionnelle.
Or, la commission de la législation générale au sein de l’ANC  est en train d’étudier le projet de loi portant sur «les élections» où il y a beaucoup de divergences sur les conditions de candidatures soit pour «la Chambre des députés du peuple», soit pour la présidence de la République».
Mais il est sûr, ajoute le député d’Al Moubadara, «que l’instance de contrôle de la constitutionnalité demeure primordiale et doit être instaurée et mise en exécution avant le 25 avril 2014, et avant même toute approbation de n’importe quelle loi pour la simple raison que le délai stipulé par l’article 120 de la Constitution est de sept jours afin que l’instance statue sur une affaire portée contre une loi. Il est donc normal que l’instance soit mise en place avant toute promulgation de loi.
Cependant, un autre article peut être pris en compte, c’est l’article 3 qui stipule explicitement que la souveraineté absolue revient au peuple. Ce qui veut dire obligatoirement que le peuple tunisien est libre de choisir ses dirigeants et n’a nullement besoin d’une tutelle qui limite ses choix».
Voilà qui augure de chaudes discussions au sein de la commission de la législation générale en particulier et de l’ANC en général.
Samira DAMI

vendredi 14 février 2014

Célébration de la ratification de la Constitution , Les raisons de l'absence de Mahmoud Abbés

Lors de la cérémonie officielle de célébration de la ratification de la Constitution qui s’est déroulée le 7 février à l’Assemblée nationale constituante (ANC), en présence d’un grand nombre de chefs d’Etat et de présidents de Parlements arabes, africains et européens, et autres invités de par le monde, les observateurs ont remarqué l’absence du président palestinien Mahmoud Abbas. D’aucuns s’interrogent sur les raisons de cette absence. Des sources dignes de foi affirment que le président provisoire de la République Moncef Marzouki «n’a pas adressé une invitation officielle à son homologue palestinien».
Plusieurs observateurs se sont demandé «si Moncef Marzouki a agi de la sorte afin de contenter le mouvement Ennahdha, lequel, selon eux, appartient à la même mouvance politique et idéologique que le Premier ministre Ismaël Hania, chef du Hamas ?»
Ainsi le seul pays, selon les mêmes sources dignes de foi, à n’avoir reçu qu’une seule invitation : celle adressée par le président de l’ANC, Mustapha Ben Jaâfar, à son homologue Selim Zaânouni, lequel s’est fait représenter par le vice-président du Conseil national palestinien (CNP) (Ndlr : Parlement) Azzem Al Ahmed.
L’absence du président du CNP exprimerait-il un message de mécontentement politique de la part de l’autorité officielle palestinienne ?
Ce manque de clairvoyance, selon plusieurs observateurs politiques, ne s’inscrit pas dans la tradition diplomatique tunisienne à l’égard de la Palestine. La Tunisie a toujours soutenu le pouvoir central palestinien sans jamais s’ingérer dans les affaires internes palestiniennes.
Et cette tendance politique — sans aucun consensus, du reste, des partis politiques et du peuple tunisien — à vouloir faire pencher la balance en faveur du parti Hamas a vu le jour depuis le 23 octobre 2011.
A preuve, l’exemple suivant dans le domaine de l’enseignement supérieur, le gouvernement tunisien a toujours accordé un nombre important de bourses d’études adressées à l’Autorité palestinienne. Or, pour l’année universitaire 2013-2014, l’ancien ministre de l’Enseignement supérieur, Moncef Ben Salem, a accordé 26 bourses d’études adressées au gouvernement du Hamas, contre seulement 5 bourses accordées à l’autorité officielle palestinienne. Sans compter d’autres exemples traduisant le parti pris de l’ancien gouvernement en faveur du Hamas.
Le nouveau gouvernement Mehdi Jomâa, tous ministères confondus, révisera-t-il cette politique d’interférence dans les affaires intérieures palestiniennes, en réinstaurant la diplomatie équilibrée et perspicace traditionnelle tunisienne à l’égard de la Palestine et d’autres pays, qui nous a toujours valu le respect international ?

SAMIRA DAMI 
Ajouté le 11-02-2014