lundi 9 novembre 2015

Arrêt sur image: JTC, LE BILAN

Des hauts et des bas

    Par Samira DAMI
La 17e édition des JTC (Journées théâtrales de Carthage), qui s’est déroulée du 16 au 24 octobre, a vécu avec des hauts et des bas, suscitant des critiques concernant le manque d’organisation, l’improvisation, les problèmes de logement  et de logistique subis par certains invités, l’absence de guide et de bulletin quotidien qui constituent la mémoire de ces journées, et nous en passons. Mais là où le bât blesse, c’est que ces critiques ciblent, également, la qualité des productions dont certaines laissent à désirer, car plusieurs d’entre elles, aussi bien arabes et africaines qu’européennes, n’avaient point le niveau requis pour figurer au programme de cette édition, ce qui est corroboré non seulement par la critique mais aussi par plusieurs professionnels du théâtre. Leïla Toubel, dramaturge et comédienne, l’a relevé sur sa page facebook où elle a noté : «Nous avons vu des spectacles qui ne ressemblent à rien alors que la qualité artistique est la colonne vertébrale de tout festival qui se respecte». Il est, ainsi, clair que les programmateurs ont fait le choix de la quantité au détriment de la qualité car dans certaines pièces on constate d’emblée soit la prépondérance du texte sur la mise en scène, soit carrément la médiocrité aussi bien du texte que de la mise en scène.
Or, une manifestation africaine et arabe a une obligation de qualité, afin d’éviter le nivellement par le bas. Ainsi, mieux vaut une trentaine de pièces de niveau certain qu’une cinquantaine dont la moitié s’avère médiocre. L’objectif premier des JTC étant d’attirer le public, par la qualité et d’ancrer davantage la pratique et la fréquentation théâtrales et non point de le rebuter définitivement du 4e art en lui offrant des semblants de créations.

Des Acquis 
Mais il y a aussi du bon, puisque la 17e édition des JTC s’est distinguée par certains aspects et acquis positifs, notamment, celui de la décentralisation qui a permis au théâtre d’aller à la rencontre des régions défavorisées et désertées par la culture. Ainsi, si 20.000 spectateurs se sont déplacés pour goûter au plaisir du 4e art à Tunis, 75.000 spectateurs se sont déplacés dans les régions, dont la majorité est composée d’enfants ; on ne peut, donc, que saluer l’entrée de la culture de nouveau dans les écoles, les lycées et l’université après une éclipse durant, au moins, deux décennies. Cette action permet non seulement de familiariser les enfants et les jeunes, qui constituent le public de demain, avec le 4e art mais de favoriser l’amour des arts en général et du 4e art en particulier. Autres impacts de l’ouverture des établissements scolaires et universitaires sur le théâtre : stimuler la pratique culturelle, et donner le goût de l’apprentissage de l’art théâtral aux enfants et aux jeunes.
C’est pourquoi l’Etat devrait veiller  à encourager la production théâtrale pour enfants et pour jeunes, cela à travers la formation et l’encadrement des troupes et des compagnies qui ciblent ce public spécifique.
Le théâtre pour enfants notamment étant une entreprise délicate et sensible qui nécessite outre une formation artistique, des connaissances pédagogiques et psychologiques incontournables pour un message et un texte adéquats et une mise en scène de qualité. Il serait incongru de proposer des productions médiocres aux enfants ou de les considérer comme un public de 2e catégorie. Bien au contraire. C’est pourquoi il serait judicieux que certaines troupes se spécialisent davantage dans la production de théâtre pour enfants.

Le nécessaire retour de la compétition

Saluons, également, les hommages en guise de reconnaissance à des dramaturges et metteurs en scène qui ont tiré leur révérence tels Ezzeddine Guennoun, Monia Ouertani, Taïeb Oueslati  et autres, sans compter les hommages rendus à des acteurs qui ont tant donné au 4e art, en particulier, et à la culture en général tels Fatma Ben Saïdane, Ahmed Snoussi et Abdellatif Kheïreddine. Témoigner de l’amour et de la reconnaissante aux artistes est impératif pour la pérennité des arts.
De son côté, le marché des JTC représente un nouvel acquis à sauvegarder afin de permettre aux créations théâtrales africaines et arabes de voyager. Aussi des pièces tunisiennes, libanaises, marocaines et syriennes ont saisi cette chance.
Mais encore une fois cette action ne s’est pas déroulée sans querelles, certains hommes de théâtre tunisiens ayant contesté le choix des pièces en question.
Mais peut-on être tout à fait impartial ou contenter tout le monde quand il s’agit d’art?
Enfin, afin d’améliorer la teneur de cette 17e édition au plan de l’organisation et de la qualité du programme, notamment, il serait judicieux qu’à l’instar des JCC (Journées cinématographiques de Carthage), les JTC aient un comité  d’organisation permanent. Cela afin de pouvoir préparer bien à l’avance et de peaufiner aussi bien la programmation que l’organisation, l’infrastructure et la logistique nécessaires.
Au final, disons, encore une fois, que sans la compétition et les prix, les JTC ont perdu de leur piment et attrait et de cet esprit de compétitivité utile et nécessaire à l’évolution de tout art.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire