RETRO 10 juin 2012-06-07
LE Journal
télévisé
Comme un retour à la case départ ?
Après le 14 janvier le
Journal Télévisé (J.T.) de la première chaîne publique s’est complètement transformé, abandonnant la langue de bois et
la pesanteur propagandiste qui le caractérisait, pour gagner en fraîcheur, en
audace et, donc, en audience. La hiérarchisation de l’information a été
chamboulée du tout au tout. Fini les interminables plages consacrées aux
activités de l’artisan du changement, à ses discours fleuves, aux réalisations
de «l’ère novembriste» et place aux événements foisonnants et à l’information
de proximité s’ouvrant sur la rue et se
focalisant sur les préoccupations du peuple.
Cette mutation du téléjournal d’El Watania 1, survenue dans
le sillage du bouleversement politique qu’a connu le pays, a été remarquée et
saluée par les téléspectateurs qui s’y sont, enfin, retrouvés puisque le 20H00, et en prolongement les émissions de
débats concoctées par de jeunes journalistes, tentaient par tous les moyens de refléter les
faits les plus importants qui se déroulaient dans le pays tout en veillant à
assurer cette objectivité objet du désir de tous.
C’était avant les élections du 23 octobre 2011. Mais après cette
date, et sous la pression ambiante et notamment le feuilleton
du sit-in «des envoyés spéciaux » voulant nettoyer les médias
publics des «rebuts novembristes», le J.T. semble retrouver, au fil des jours, sa configuration antérieure
en renouant avec cette hiérarchisation verticale, défiant à nouveau la
proximité, et privilégiant l’ouverture avec les activités officielles quelles
soient gouvernementale, présidentielle ou ministérielle. Les ouvertures avec
des sujets, qui concernent directement les citoyens, se font si rares…Par
moments certaines éditions du J.T. nous rappellent, vu la langue de bois,
celles si pesantes et indigestes de l’ancienne ère. Et l’on craint qu’à ce
rythme ce rendez-vous, qui a gagné en audience, plus de 40%, ne perdent en
intérêt en devenant au service non pas
des citoyens mais surtout des politiques au pouvoir. L’autocensure sous la
pression est-elle de retour ? Et est-ce le retour à la case départ ?
Certes on observe une certaine résistance à travers quelques
sujets sociaux ou des séquences pouvant créer débat et controverse comme celle
encore «fumante» de Slim Ben Hmidane, ministre des domaines de l’Etat et de la propriété
foncière mais notre crainte vu que tout le monde, politiques, partisans et
citoyens, s’est mis à donner des leçons aux médias et aux journalistes, c’est
de voir les anciens reflexes anti-professionnels d’auto- censure, en prévention
de la censure, faire leur réapparition et reprendre, ainsi, du poil de la bête.
Or, l’information est une spécialité et une science. N’est pas journaliste qui
veut, d’où la nécessité que l’équipe rédactionnelle du J.T. ne tienne compte
que des critères du vrai travail
journalistiques, en toute objectivité, éthique et professionnalisme. Tout le
reste n’est que verbiage et papotage. Il est, donc, temps de se rattraper et d’empêcher
toute récupération de tous bords et de toutes couleurs politiques.
Obligation de réserve !
M. Slimane Ben Hmidane, ministre
des domaines de l’Etat et des affaires foncières a privilégié, lors de la
rencontre au palais de Carthage sous le thème «Quelle est l’origine de vos
biens », lançant en off et devant les caméras: «C’est mon opinion personnelle et je l’affiche devant tous les
médias, j’ai privilégié El Jazeera, car c’est la principale chaîne qui nous a aidés, nous les militants en
exil , à faire tomber la dictature et nous a offert une
tribune. Ce qui, naturellement, n’était pas possible pour la chaîne
nationale, et c’est pourquoi en guise de reconnaissance je donne toujours la
priorité à El Jazeera». Et
d’ajouter en tançant El Watania 1 : «Avant de réserve, notamment, concernant un média national et a fortiori après la révolution et les
élections du 23 octobre, seul un citoyen est habilité à critiquer et à dire
franchement son opinion, car elle ne fera certainement pas de vagues comme le
ferait celle d’un ministre tenu de défendre « le produit national répondre à votre question j’informe les
téléspectateurs que je n’ai jamais été invité, ne serait ce qu’une fois, par la
chaine publique». Ce à quoi le journaliste-présentateur des infos a
répliqué : «C’est votre droit, M. Le
ministre, d’exprimer votre reconnaissance à qui bon vous semble ». Or, le présentateur
avait tout faux car un ministre occupant une fonction officielle est tenu par
une obligation de».
S.D.
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