dimanche 10 mai 2015

RETROVISION

STRATEGIE DE COMMUNICATION POLITIQUE
Savoir-Faire et Faire-Savoir 
Par Samira DAMI 

"Une agence pour les moustiques», «Le drapeau tunisien, destiné à figurer
au Guiness-book, sera transformé en couvertures qui seront distribuées 
aux familles démunies des régions», «Un visa pour la Turquie sans la mention
«motif de la visite : Jihad» et nous en passons. Ces déclarations radiophoniques 
et/ou télévisées des membres du gouvernement Essid, soit respectivement
le ministre de l’Environnement, Néjib Dérouiche, la ministre du Tourisme, Salma Rékik Elloumi,
 et le ministre des Affaires étrangères, Taïeb Baccouche, ont provoqué une vague de réactions, entre sarcasmes et indignation, aussi bien sur les réseaux sociaux qu’au sein de l’opposition et de la classe politique.
Outre ces dérapages et boulettes sémantiques, les lapsus linguae pullulent 
non seulement de la part des membres du gouvernement Essid, mais aussi du
Président de la République. Le dernier en date commis par Béji Caïd Essebsi 
concerne la date de la rencontre avec la chancelière allemande Angela Merkel 
prévue le 7 juin en marge du G7, or, le président s’est trompé de date en avançant 
qu’elle aura lieu le 7 novembre (sic). Cela lors de la conférence de presse, tenue
le 27 avril, avec son homologue allemand Joachim Gauk, ce qui a provoqué l’hilarité 
des présents et les railleries des internautes sur la Toile. Autre lapsus célèbre de BCE :
 la confusion entre François Hollande et François Mitterrand lors de son discours
qui a suivi l’inauguration de la stèle de commémoration des victimes de l’attentat du Bardo,
le 29 mars dernier. 
Certes, les glissements de langage ne sont pas l’apanage du gouvernement et du président actuels,
 car du temps de la Troïka, il y en a eu des tas.
 Qu’on se rappelle, notamment, la déclaration de Samir Dilou, alors ministre
des Droits de l’homme et de la justice transitionnelle, quand il avait affirmé 
«qu’aucun manifestant à Siliana n’a perdu les deux yeux» (resic) lors de la séance
plénière du 30 novembre 2012, consacrée à l’audition du gouvernement de la Troïka sur les événements dramatiques de Siliana.
Qu’on se rappelle également le lapsus de l’ancien chef du gouvernement, Hamadi Jebali, 
qui a dérapé en déclarant, dans son discours du 9e congrès du parti Ennahdha, 
qu’on est devant «une dictature naissante» alors qu’il voulait dire «Une démocratie naissante».
De son côté, l’ancien président provisoire, Moncef Marzouki, en visite au Caire en juillet 2012, avait invité, dans une conférence de presse, Mahmoud Morsi, alors président de l’Egypte, à visiter «La Tunisie à l’est de votre grande Nation», avait-il précisé (reresic).
c’était une de ces bévues qui mettaient en cause les connaissances géographiques aussi bien au niveau de la présidence que des membres du gouvernement de la Troïka, quand par exemple, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Rafik Abdessalem, attestait «qu’Istanbul est la capitale de la Turquie» ou quand il avait déclaré sur Al Jazira que «les côtes tunisiennes s’étalaient sur 500 km».

Coaching politique 
Ainsi, il est clair que les glissements de langage, les lapsus et les déclarations médiatiques à
l’emporte-pièce des hommes politiques se multiplient sous la pression de l’exercice du pouvoir et
de la pression médiatique qui mettent à dure épreuve les responsables. Ces bévues ne peuvent être évitées sans une connaissance approfondie des dossiers et sans la mise en place d’une véritable stratégie de communication du gouvernement. Cette stratégie de communication
suppose aussi bien un volet pratique : le coaching, qu’un volet théorique : des plans de communication.
Le coaching permet «de préparer les hommes politiques à s’adresser aux médias et de les aider à dire clairement et simplement les choses aux citoyens». Plus, selon le journaliste Stephen Bunard fondateur en 2002 de «coach and com», aux Etats-Unis, «le coaching politique aide les gens à prendre la parole en public, à être vrai, à trouver leur style. Les aider non pas à dire ce qu’ils ne
pensent pas, mais à développer l’art de dire et la confiance en soi».
Autrement dit, le coaching donne de l’aplomb au niveau du comportement et de la parole, ce qui éviterait de voir un responsable politique faire une déclaration la tête baissée et à voix inaudible,
comme le fait souvent le chef du gouvernement Habib Essid.
Maintenant, concernant les plans de communication, il s’agit d’élaborer une stratégie qui tienne compte des besoins et des attentes des citoyens, autrement dit d’établir les priorités (la cohésion sociale, la jeunesse, la sécurité, le coût de la vie, la culture, le sport, etc.) et de véhiculer, au fil de l’actualité, les messages que le gouvernement souhaite passer aux citoyens concernant
ces divers enjeux, sujets et domaines.
Bref, une stratégie de communication gouvernementale garantit la rigueur, le travail d’équipe, la coordination et la cohésion entre les différents ministères et permet d’éviter les dérapages de langage, les lapsus, les bévues et les incohérences, surtout quand il s’agit d’actualité brûlante et de déclarations à chaud aux médias. 
Une stratégie de Com ne peut que renforcer la crédibilité du gouvernement et l’harmonie de son équipe. Cette politique de communication peut se résumer en une devise, des plus éloquentes et expressives, adoptée d’ailleurs par certains pays africains : «savoir-faire et faire-savoir».
S.D.



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