vendredi 30 décembre 2011


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Chroniques de la révolution, de Habib Mestiri, fête le 14 janvier au Colisée

Des enfants et des jeunes en action

Des enfants et des jeunes en action
• Trois présences d’exception : Claudia Cardinale, George Woolinski et Françoise Gallo
Avant-première de Chroniques de la révolution, le 14 janvier au Colisée, un film documentaire de 90 minutes, de Habib Mestiri. En présence de trois témoins d’exception: Claudia Cardinale, George Woolinski et Françoise Gallo, tous trois d’origine tunisienne.
Ils évoquent avec d’autres témoins, entre enfants et jeunes Tunisiens, comment ils ont vécu la révolution de la liberté et de la dignité. Le détail.

Pour fêter le 14 janvier par l’image, la société de production Ciné 7e Art de Lassaâd Goubantini, en collaboration avec la société de production française «Deep Vision», a produit un long métrage documentaire réalisé par Habib Mestiri, intitulé Chroniques de la révolution.
Le pitch est simple : c’est la révolution tunisienne vue à travers les regards croisés de jeunes issus de différents milieux et régions : la bourgeoisie francophone de Sousse, l’étudiant rigoriste d’un quartier populaire de Tunis, l’artiste bohémien, le martyr amputé de Kasserine, l’enseignant pieux de Sidi Bouzid, les enfants citoyens de Gabès.
Ces jeunes de tous âges racontent, par leurs témoignages et leurs propres films, comment ils ont vécu la révolution et quel futur ils imaginent. Ils confrontent leur regard avec celui d’artistes tunisiens internationaux. L’artiste Claudia Cardinale, le caricaturiste dessinateur coloriste George Woolinski, et la cinéaste Françoise Gallo, tous profondément attachés à une Tunisie cosmopolite.
Ces trois témoignages d’exception ont été filmés par H. Mestiri, tandis que les huit autres sont l’œuvre de jeunes qui ont baladé leur caméra dans les banlieues chaudes de la capitale : Le Kram, Jebel Lahmar, Ezzahra, ainsi qu’à l’intérieur du pays : Sousse, Kasserine et Gabès.
Le réalisateur, Habib Mestiri, fidèle à son parcours de cinéaste, a toujours été animé par le souci de faire œuvre de mémoire.
Ainsi en a-t-il été dans Images saccadées où il a reconstruit un pan de la mémoire de la Ftca (Fédération tunisienne des cinéastes amateurs).
Concernant ce deuxième long métrage, il déclare : «J’ai sillonné le pays en essayant de filmer ce qui se présentait à moi, d’emblée, spontanément, sans que je ne puisse me focaliser sur un aspect en particulier… Les jours passaient, des événements plus ou moins graves se succédaient lors que je continuais à filmer sans pouvoir me concentrer sur un thème précis.

La révolution vue par les enfants

Les établissements scolaires ayant dû fermer leurs portes à cause des événements secouant le pays, les élèves étaient obligés de rester chez eux et plusieurs d’entre eux — dont mon propre fils — se retrouvaient chez eux littéralement «scotchés» à l’ordinateur. Face à cette situation malsaine, je m’arrangeais pour que mon fils puisse m’accompagner, de temps à autre, pour faire les courses. Ce qui m’a permis, à l’occasion, de suivre certaines discussions qu’il avait eues avec ses amis et camarades, croisés lors de nos sorties…».
Bref, tout cela a fait sentir au réalisateur que tout ce qui se passait était en train de revêtir une grande importance aux yeux des enfants et des jeunes qui ne pouvait que les marquer fortement. Tout semblait changé pour eux. Car, renchérit le réalisateur : «Il n’était plus question dans leurs discussions des héros de la veille, joueurs de football, artistes et chanteurs, devenus des héros de “seconde zone”. Ceux-ci étaient remplacés par des héros proches comme leurs propres pères, oncles, voisins de quartier, qui, armés de bâtons et postés à des barrages de contrôle improvisés, veillaient, le soir tombé, dès l’heure du couvre-feu jusqu’à l’aube, faisant face aux intrus, entre miliciens, malfrats et snipers, qui menaçaient la sécurité de leur quartier».
En voyant également son fils «scotché» à l’ordinateur partageant des infos et des vidéos avec d’autres enfants de son âge, à travers le pays, chacun racontant ce qu’il a vu et livrant ses propres commentaires, il a pris conscience de la nécessité de réaliser cette chronique de la révolution vue par les enfants et les jeunes, de filmer leurs propos, les films et séquences de vidéo échangés à travers facebook.
«Ces documents tantôt tristes, tantôt graves, tantôt légers… des documents qui méritent d’être conservés, pour témoigner de la résurgence de “l’idée de la révolution”. Une idée qu’on croyait devenue totalement anachronique, une idée qu’on pouvait assimiler à une curiosité historique, dépassée, digne de figurer dans un musée ou dans un livre d’histoire, sans plus…».

Traitement filmique

Evoquant le traitement filmique, le réalisateur explique: «Nous avons, dans ce film, recouru aux procédés suivants: nous avons rassemblé le maximum de documents audiovisuels traitant de la révolution échangés par les jeunes dans diverses régions du pays. Nous avons rassemblé le maximum de témoignages et de récits émis par des jeunes ayant vécu des événements en relation directe avec la révolution, et ce, en particulier dans les régions d’où elle est partie: Kasserine, Regueb, Gabès et le Grand-Tunis. Les jeunes sont à la fois devant et derrière la caméra».

Les protagonistes

Une dizaine de protagonistes ont témoigné, dans ce film, entre enfants, jeunes et personnalités célèbres d’origine tunisienne.
Il s’agit de Mohamed Ammar, 12 ans, fils de militaire, résidant dans le quartier populaire de Jebel Lahmar. Avec ses copains de quartier, il a réalisé un court métrage de fiction reconstituant les moments forts de la révolution.
Achraf Ammar, 24 ans, frère aîné de Mohamed Ammar, étudiant, futur ingénieur en chimie industrielle, passionné de musique, cinéaste amateur. Avec ses amis, il a mis sur pied un groupe de création artistique en mettant en image des chansons rap de leur composition. Ils proposent une fiction où deux histoires d’amour s’entrecroisent: un amour impossible et l’amour de la patrie.
Nader El Waëd, 22 ans, élève en multimédia, résidant à Ezzahra, part de l’immolation de Bouazizi pour raconter la révolution à travers un court métrage en 3 D.
Sayeb Bel Hadj Amor, la quarantaine, père, chômeur et cinéphile. Il faisait partie des comités de quartier qui encadraient les émeutes dans le quartier populaire du Kram-Ouest. Sayeb a risqué sa vie à plusieurs reprises en filmant les émeutes.
Ahmed Errezgui, 14 ans, élève, résidant à Kasserine. Peintre et cinéaste amateur, Ahmed, comme la plupart des enfants de Kasserine, a été profondément touché par la violence. Il a filmé le témoignage d’un lycéen de 17 ans blessé pendant la révolution (amputé d’une jambe) pour raconter le soulèvement à Kasserine.
Jihène Brahem, 25 ans, résidente à Sousse, diplômée en commerce international, passionnée de lecture de vieux livres de théâtre, essaie de porter un regard critique sur l’âpre révolution à travers un film de montage basé sur les documents recueillis dans la ville de Sousse.
Aymen Jebali, 30 ans, professeur d’anglais résidant à Regueb, a filmé la révolution dans la première ville tunisienne qui a «décrété» la désobéissance civile.
Enfin, les trois témoignages d’exception sont ceux de Claudia Cardinale, Georges Wolinski et Françoise Gallo.
Chronique de la révolution est actuellement en cours de montage et sera, donc, fin prêt pour commémorer le 14 Janvier, jour de l’accomplissement de la révolution et de la fuite du président «déchu».
Auteur : Samira DAMI

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