lundi 21 mai 2012

65e Festival international de Cannes

Présence tunisienne : des jeunes à la recherche de visibilité

Présence tunisienne : des jeunes à la recherche de visibilité
 De notre envoyée spéciale Samira DAMI
Le cinéma tunisien est pour la énième année absent de la sélection officielle du 65ème Festival de Cannes, dans les autres sections parallèles aussi, mais plusieurs producteurs et surtout jeunes cinéastes sont présents sur la Croisette et profitent  du pavillon tunisien, trônant au village international, pour donner une visibilité à leurs films, entre courts et longs métrages. Une visibilité qui se décline à travers plusieurs actions : montrer les films dans le but d’une éventuelle sélection aux festivals internationaux, rechercher des compléments de financements ainsi que des options de vente au marché du film qui compte pas moins de 1000 participants venus de 99 pays. Cela outre la participation au «Short-Film Corner», sorte de forum où ont été mis à la disposition des professionnels et du public plus de 2000 courts métrages dont dix tunisiens. Le détail.
Hbib Attia, producteur, a quatre projets, à différents stades de production : Ya Man Ach ou C’était mieux demain un long métrage documentaire de Hend Boujemaâ, Maudit soit le phosphate de Sami Tlili,en phase de montage, Shallat Tounés de Kawther Ben Hnia en cours de montage, enfin Palestine Stéréo, un long métrage de fiction de Rashid Maâsharaoui  en phase de développement. Cet opus bénéficie déjà du Fonds Sud et d’autres financements du Moyen-Orient et de la Norvège et la recherche de fonds continue à Cannes. Le tournage débutera en octobre 2012 à Ramallah avec la participation de plusieurs techniciens tunisiens dont le chef opérateur Tarak Ben Abdallah, l’acteur principal pressenti n’est autre que Lotfi Abdelli. Rappelons que le précédent film du réalisateur palestinien, Leila’s Birthday, a été également coproduit par ce même producteur.
«C’était mieux demain a été sélectionné au Fidlap qui est une plateforme internationale de coproduction où sont soumis des films du monde entier à différents stades de la production et les 12 projets de films internationaux sélectionnés sur les 300 qui étaient en lice seront présentés aujourd’hui, lundi, à 11h30, à Cannes aux professionnels et à la presse internationale. Le Fidlap est amarré au Festival international du documentaire de Marseille, le plus important dans le genre en France. J’entreprends également des contacts avec plusieurs directeurs de festivals dont Locarno, Toronto et autres pour d’éventuelles participations, sans compter l’importance du marché qui particularise, notamment, le Festival de Cannes», explique Hbib Attia patron de Cinétéléfilms.

Mohamed Ali Ben Hamra, jeune producteur, a produit cinq courts métrages réalisés entre la Tunisie, l’Italie et la France. A Cannes il ne fait pas de la figuration comme certains, il participe, à travers sa société «Polimovie International Pictures», à trois activités à Cannes : d’abord, la sélection de Contente-toi du pire de Majdi Lakhdar à La Fabrique des Cinémas du Monde, un programme de travail mis en place par le pavillon «Les Cinémas du Monde», organisé du 16 au 25 mai, par l’Institut Français de Coopération et l’Organisation internationale de la Francophonie  et conçu avec la collaboration du Festival de Cannes et son marché du film. Cette action parrainée, dans sa 4e édition, par des parrains citoyens du monde, l’actrice Maria de Medeiros et le réalisateur Elia Suleiman, est destinée à concrétiser le développement des projets du premier et du deuxième films issus des pays du Sud en les soutenant financièrement. Cette année dix projets ont été sélectionnés sur les 150 soumis au comité de sélection. «Ce qui offrira à notre projet une bonne visibilité médiatique», argumente tout fier le producteur. Ensuite, la participation de cette société de production à la 9e session du «Producers Network» qui accueille 550 producteurs du monde entier autour d’une série de rencontres programmées pour stimuler la coproduction internationale. «Ce qui nous offrira, explique le producteur, l’occasion de rencontrer des partenaires financiers afin de boucler le plan de financement de nos deux projets inscrits, en l’occurrence : Horriya un long métrage de Mehdi Rmili subventionné par le ministère de la Culture et sélectionné au programme Interchange 2012 aux festivals de Torino et Dubaï pour des compléments de financement et Contente-toi du pire,  sélectionné également à l’Atelier Sud Ecriture. Enfin, l’inscription au «Short- Film Corner» de La nuit de Badr de Mehdi Rmili. Un espace augmentant les chances des jeunes réalisateurs tunisiens de voir leurs films programmés dans les festivals internationaux et de révéler, ainsi, leur talent à de potentiels partenaires et diffuseurs dans le monde».
Hazem Berrabah fait partie des jeunes professionnels qui ont déposé leurs films au «Short-Film Corner», lui c’est un chef opérateur,  mais qui a toujours affiché un intérêt pour les courts métrages.  Il en a déjà réalisé trois, un documentaire, chemin d’eau, en 2003, Refuge, une fiction en 2007 et Caravane de l’Erg, en 2011. Le dernier qu’il a réalisé s’intitule Maj’noun (Le fou). Ces films lui permettent de respirer et de changer de fusil d’épaule. A ses yeux ce forum payant permet «de filtrer les films professionnels véhiculant un minimum de qualité et augmente les chances d’achat des films, ce forum étant visité par des distributeurs,  directeurs de festivals,  producteurs et journalistes. Toutefois il faut communiquer et accompagner le dépôt du film par un matériel de promotion, DVD, flyers, affiches et autres. Or, cela coûte cher et ce qui coûte cher aussi c’est d’être à Cannes et quand le ministère de la Culture n’aide pas ces jeunes, il est normal qu’ils ne peuvent pas venir à Cannes».
Parlant du thème de son film, le réalisateur précise «Majnoun est un film poétique inspiré de deux poèmes Majnoun Leila et Le fou D’Elsa de Louis Aragon. J’ai voulu rendre  hommage à ses poèmes dans un film sans dialogues à travers la danse contemporaine. Mon choix est de défendre la notion de la liberté de l’amour car, quand on aime on n’est plus dans une logique de langue, ni de religion. Il n’existe pas de frontière en amour. D’où l’utilisation d’un art universel qui est la danse  de manière à développer un langage filmique avec le corps, non sans références esthétiques arabo-musulmanes. Tout le film est tourné dans le sud tunisien, à la référence architecturale claire, dans une mise en scène expérimentale favorisant la recherche et où les renvois à la danse soufie sont nets».
Néjib Azouz a réalisé, lui, plusieurs films: Aux origines de la Révolution,  El Guaria et Handicap, croire en soi. Tous ces films il les présente sur la Croisette. Ces courts métrages se focalisent sur la pauvreté et les conditions de vie précaires de plusieurs microcosmes sociaux. Il a tourné El Guaria avant la Révolution: «Les autorités m’ont harcelé, empêché de tourner pendant deux jours en me confisquant la caméra. A Cannes je viens de vendre Aux origines de la Révolution à la télévision espagnole et j’en suis fier. Sans compter que j’ai d’autres options de vente...»
D’autres réalisateurs et producteurs sont à Cannes tels Karim Oueslati, Sonia Chamkhi et autres et ils sont là à la recherche de cette  visibilité nécessaire pour l’existence réelle et efficace d’un film ou d’un projet qu’il faut accompagner de bout en bout afin qu’il voie le jour ou qu’il aille à la rencontre des publics des festivals ou des circuits commerciaux de par le monde

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