jeudi 3 mai 2012

Témoignages- 1er mai- Ali Bouraoui, membre du bureau politique d'Ennahdha: La manifestation était à la hauteur de l'événement



«La manifestation du 1er mai était à la hauteur de l’étape actuelle et de l’événement, parce qu’elle a réuni tous les Tunisiens dans leur majorité nourris de la lutte, de l’histoire, de la culture et des principes de l’Ugtt.
L’appartenance politique différente ne nous empêche pas d’être unis syndicalement. Parce que la conjoncture nous l’impose. Les slogans qui divisent étaient minoritaires. J’ai même vu des manifestants rigoureusement déterminés à éviter toute confrontation en s’opposant aux slogans lancés contre le gouvernement. On peut s’exprimer librement sans recourir à la violence et à la confrontation. J’espère voir cette tendance et cet esprit de tolérance se poursuivre».
Concernant la cherté de la vie, M. Ali Bouraoui déclare: «Nos excuses pour cette flambée des prix des produits alimentaires, mais il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton car on est face à un réseau très compliqué de contrebande et il faudra du temps au gouvernement pour y mettre fin et comprimer ainsi les prix. Mais j’ai confiance dans le gouvernement pour parvenir à le faire».
Enfin, à propos des négociations sociales entre le gouvernement et l’Ugtt, M. Bouraoui affiche son optimisme, mais il déplore que certains considèrent la révolution comme une occasion pour piller l’Etat.
«Certes, il est normal d’assurer l’emploi à tous, mais encore faudrait-il savoir qu’aucun gouvernement ne peut à la fois offrir l’emploi aux chômeurs, augmenter les salaires et réparer les infrastructures précaires du pays. Il faut que les syndicalistes sachent raison garder. Les citoyens ont, certes, raison de revendiquer, mais rien ne sert d’affaiblir le gouvernement. Travaillons ensemble pour résoudre les problèmes et développer le pays».

Belgacem Ben Abdallah, membre du bureau national de l’UDC (Union des diplômés chômeurs) : «Pour des décisions urgentes au profit des chômeurs»

«C’est un grand jour, parce que, premièrement, l’UDC est partie prenante dans la libération de la rue suite à la violence que nous avons subie lors de notre manifestation du 7 avril. Nous sommes là aujourd’hui, à l’avenue Habib-Bourguiba, pour célébrer le 1er mai avec les travailleurs, à qui nous souhaitons bonne fête, en ce sens que la relation des chômeurs avec les travailleurs est naturelle, parce que ces deux catégories sont les victimes des choix économiques et sociaux : les ouvriers subissent la hausse des prix alimentaires et autres tandis que les chômeurs voient leur situation se perpétuer en raison de ces mauvais choix économiques.
Les sans-emploi en ont marre d’attendre, certains étant au chômage depuis 12 ans et plus. Le message de l’UDC est clair : le gouvernement doit prendre des décisions révolutionnaires et urgentes, sinon les prémices d’une deuxième révolution sont en train de se profiler. Une révolution qui rectifiera la voie de celle du 14 janvier d’autant plus que les chômeurs n’ont rien à perdre».

Bochra Belhaj Hmida, militante de la société civile : «Contre les divisions et les scissions»

«Cette fête du 1er mai aurait dû être l’occasion de l’unité nationale. Or nous sommes ici, à l’avenue Bourguiba, non pas ensemble, mais les uns contre les autres vu les slogans que j’ai entendus contre l’Ugtt. Si certains manifestants sont ici pour la première fois de leur vie, sachez qu’ils ne sont pas là pour les travailleurs ni pour l’unité nationale. Ils sont là pour soutenir le gouvernement et pour nous diviser, d’où l’ambiance malheureusement tendue.
Ce qui est dû au fait que jamais, depuis les élections du 23 octobre, les trois présidents, de la République, du gouvernement et de l’ANC, n’ont eu un discours apaisant, unificateur et susceptible de calmer les esprits et de rétablir le dialogue entre toutes les composantes politiques du pays.
L’appel d’Ennahdha n’est pas un appel d’unité mais de concurrence dans un esprit de campagne électorale. L’avenir du pays est entre les mains du gouvernement, j’appelle à prendre conscience qu’il n’a pas le droit de pousser à la division et à la scission. S’il croit que ces méthodes peuvent continuer comme sous Ben Ali, il se trompe. Car la vigilance de la société civile, et même des citoyens non politisés, qui sont de plus en plus nombreux, est grande. Outre que la peur a disparu et c’est ce que nous avons gagné de la révolution».

Mohamed Kilani, secrétaire général du Parti socialiste de gauche : «L’union n’est pas visible sur le terrain»

«Les slogans des partisans d’Ennahdha dans cette manifestation sont surprenants car, malgré l’appel à l’unité de la direction d’Ennahdha, l’union n’est pas visible sur le terrain. Il y a les syndicalistes et les démocrates d’un côté et Ennahdha, de l’autre.
Ce n’est pas avec cette tendance manipulatrice qu’Ennahdha peut gagner la sympathie de la rue. L’avenue Habib-Bourguiba représente l’opinion de la démocratie, des droits de l’Homme, et de la laïcité et non pas des slogans qui appellent à la division. Donc j’espère que les Nahdhaouis ont reçu le message de la rue».

Mohamed Bennour, porte-parole d’Ettakatol : «Un combat commun»

«La manifestation a été à l’image de la réputation de l’Ugtt des grands jours, une syndicale militante et au rendez-vous de l’Histoire. Nous sommes en train  de vivre un grand moment historique.
La Tunisie, qui s’est débarrassée d’une dictature imposée par les erreurs d’un mauvais parcours politique que le peuple tunisien a subi à contre-cœur et les Tunisiens syndiqués et non syndiqués ont répondu massivement à l’appel de la direction de l’Ugtt pour célébrer cet appel à l’unité, les slogans lancés ici et là traduisent l’attachement du peuple à la justice, au droit de tous au travail et à la liberté. Le Parti Ettakatol, qui a exprimé son attachement au combat commun avec l’Ugtt, combat qui a commencé dans les années 70, a été au premier rang de cette grande manifestation. Malheureusement, des voix se sont élevées en provenance de parties n’ayant pas compris le sens de l’Histoire.
L’Ugtt représente un grand symbole, n’oublions pas son combat contre la présence française et son combat pour les libertés et le droit syndical. Elle a payé lourdement le prix de cette lutte et toute la nation ne peut être que reconnaissante».

Mondher Belhaj Ali, cofondateur du Forum de l’indépendance : «Le pays réel était hier sur l’avenue Bourguiba»

«Cette journée symbolise la rencontre des Tunisiens et des Tunisiennes autour d’un projet de société qu’on désire équilibré et ouvert. En ce sens que les travailleurs ne feront plus l’objet d’exclusion de quelque ordre que ce soit. Hier les travailleurs ont tendu la main, à travers leur glorieuse centrale syndicale, l’Ugtt, à toute la société civile et politique.
De toute façon, historiquement, à chaque fois que le pays va mal, les Tunisiens, de toutes obédiences politiques, se retrouvent dans une maison unique : l’Ugtt.
Le fait, également, qu’une manifestation aussi importante et aussi impressionnante se soit déroulée sans violence aucune, représente une étape importante dans notre développement politique.
Les travailleurs et d’autres Tunisiens ont manifesté dans la conviction et dans la joie. Le pays réel était hier sur l’avenue Bourguiba.
La symbolique est éloquente, du 14 janvier jusqu’à, j’espère, la réussite de la transition démocratique…»

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