Le clean et le flou
Les images de la couverture de la visite du président Moncef
Marzouki au marché de gros diffusées
dans le journal télévisé du jeudi 26 mai, sur El Watania 1, s’enchainaient dans
deux séquences de qualité techniquement très différentes : la première
séquence véhiculait des images nettes, à la résolution plus que bonne, quasi
muettes, montrant l’accueil chaleureux réservé au Président de la République, la deuxième affichait des images floues,
tremblotantes et à la résolution
approximative montrant les deux baisemains fait au président Marzouki par deux marchands de légumes sur. Ces images
qui proviennent probablement d’un téléphone cellulaire ont, on le sait, fait le
tour des réseaux sociaux.
Pourquoi cette différence criarde de qualité ? C’est
que les images prêtes à diffuser (PAD) de la première séquence provenant de la
salle de montage du palais de Carthage sont officielles, formelles, quasi
muettes, et surtout clean, car nettoyées et expurgées des baisemains en
question. En revanche les images de la deuxième séquence informelles et
anonymes qui n’ont rien d’officiel ont
été accompagnées d’un bref texte explicatif. Ce qui exprime la résistance et le
refus de la rédaction des journalistes du J.T. d’être complices de cette
occultation volontaire de tels gestes courtisans qui, dés la matinée du jeudi
avaient fait l’objet d’une vidéo postée sur le net et les réseaux sociaux, et leur refus de se limiter, ainsi, aux images
solennelles montées en dehors des salles
de montage de chaîne nationale, comme cela a été souligné par la rédaction du
20H00. La norme professionnelle, étant que les activités du président de la
République soient couvertes par une équipe du J.T. selon un angle précis et la
ligne éditoriale du J.T.
Ces baisesmains flagorneurs
qui ne sont certes pas le fait du
Président lui-même, mais qui sont en totale contradiction avec les traditions
de la République, surtout après la Révolution de la liberté et de la dignité
ont, ainsi, été occultés du côté officiel, parce que déplacés et étrangers à
nos mœurs modernes. Mais la leçon à tirer est la suivante : cacher, occulter,
nettoyer, monter, censurer, manipuler, ne sert à rien au temps des nouvelles technologies, d’internet et des
réseaux sociaux. A bon entendeur…
Embrassades
anti-déontologiques !!!
Certains journalistes et animateurs d’émissions politiques,
culturelles et de variétés, sur les chaînes locales, abusent à fond de
salamalecs, mais aussi d’embrassades et d’accolades avec leurs invités de tous
bords. Et c’est devenu monnaie courante que de voir des journalistes et des
animateurs embrasser des politiques, des artistes parfois au moment de les
recevoir, mais surtout à la fin des émissions. Et tout le monde s’y met comme
par contagion. On a même vu un animateur embrasser un supposé milicien qui a
sévi contre les manifestants pacifiques lors de la manifestation du 9 avril.
Sidérant non ?
Comment renvoyer au téléspectateur une image d’objectivité
et de neutralité si on ne fait pas preuve de distance en se laissant aller aux
effusions affectives ? Mélanger les genres, entre objectif et subjectif,
gommer les frontières entre les politiques et les journalistes est foncièrement
anti-déontologiques et contraire à toute
éthique. Car cela donne l’impression qu’il y a connivence entre les deux
parties, même si ce n’est nullement le cas. La meilleure façon d’éviter la
suspicion du public est que chacun, journaliste(s) et invité(s), reste à sa
place jusqu’à la fin du générique final comme dans toutes les télés du monde.
Surtout que dans le métier de journalisme l’important ce n’est pas la proximité
avec les politiques, les artistes ou autres personnalités publiques, mais, d’abord
et avant tout la qualité du produit et l’éthique professionnelle.
S.D.
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