mardi 8 mai 2012





 RETRO LE 6 MAI 2012

Le clean et le flou

Les images de la couverture de la visite du président Moncef Marzouki  au marché de gros diffusées dans le journal télévisé du jeudi 26 mai, sur El Watania 1, s’enchainaient dans deux séquences de qualité techniquement très différentes : la première séquence véhiculait des images nettes, à la résolution plus que bonne, quasi muettes, montrant l’accueil chaleureux réservé au Président de la République,  la deuxième affichait des images floues, tremblotantes et  à la résolution approximative montrant les deux baisemains fait au président Marzouki  par deux marchands de légumes sur. Ces images qui proviennent probablement d’un téléphone cellulaire ont, on le sait, fait le tour des réseaux sociaux.

Pourquoi cette différence criarde de qualité ? C’est que les images prêtes à diffuser (PAD) de la première séquence provenant de la salle de montage du palais de Carthage sont officielles, formelles, quasi muettes, et surtout clean, car nettoyées et expurgées des baisemains en question. En revanche les images de la deuxième séquence informelles et anonymes qui n’ont rien d’officiel  ont été accompagnées d’un bref texte explicatif. Ce qui exprime la résistance et le refus de la rédaction des journalistes du J.T. d’être complices de cette occultation volontaire de tels gestes courtisans qui, dés la matinée du jeudi avaient fait l’objet d’une vidéo postée sur le net et les réseaux sociaux, et  leur refus de se limiter, ainsi, aux images solennelles  montées en dehors des salles de montage de chaîne nationale, comme cela a été souligné par la rédaction du 20H00. La norme professionnelle, étant que les activités du président de la République soient couvertes par une équipe du J.T. selon un angle précis et la ligne éditoriale du J.T.

 Ces baisesmains flagorneurs  qui ne sont certes pas le fait du Président lui-même, mais qui sont en totale contradiction avec les traditions de la République, surtout après la Révolution de la liberté et de la dignité ont, ainsi, été occultés du côté officiel, parce que déplacés et étrangers à nos mœurs modernes. Mais la leçon à tirer est la suivante : cacher, occulter, nettoyer, monter, censurer, manipuler, ne sert à rien au temps  des nouvelles technologies, d’internet et des réseaux sociaux. A bon entendeur…

Embrassades anti-déontologiques !!!

Certains journalistes et animateurs d’émissions politiques, culturelles et de variétés, sur les chaînes locales, abusent à fond de salamalecs, mais aussi d’embrassades et d’accolades avec leurs invités de tous bords. Et c’est devenu monnaie courante que de voir des journalistes et des animateurs embrasser des politiques, des artistes parfois au moment de les recevoir, mais surtout à la fin des émissions. Et tout le monde s’y met comme par contagion. On a même vu un animateur embrasser un supposé milicien qui a sévi contre les manifestants pacifiques lors de la manifestation du 9 avril. Sidérant non ?

Comment renvoyer au téléspectateur une image d’objectivité et de neutralité si on ne fait pas preuve de distance en se laissant aller aux effusions affectives ? Mélanger les genres, entre objectif et subjectif, gommer les frontières entre les politiques et les journalistes est foncièrement anti-déontologiques  et contraire à toute éthique. Car cela donne l’impression qu’il y a connivence entre les deux parties, même si ce n’est nullement le cas. La meilleure façon d’éviter la suspicion du public est que chacun, journaliste(s) et invité(s), reste à sa place jusqu’à la fin du générique final comme dans toutes les télés du monde. Surtout que dans le métier de journalisme l’important ce n’est pas la proximité avec les politiques, les artistes ou autres personnalités publiques, mais, d’abord et avant tout la qualité du produit et l’éthique professionnelle.

S.D.

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