dimanche 27 mai 2012

65e festival internationale de Cannes —Compétition

Dans l’attente du film du festival

Dans l’attente du film du festival
 De notre envoyée spéciale Samira DAMI
Amour de l’Autrichien Michael Haneke, qui se focalise sur un couple d’octogénaires, au crépuscule de leur vie, demeure, jusqu’ici, le film le plus impressionnant des films en compétition de cette 65e édition. Et même Sur la route du Brésilien Walter Salles, l’un des plus attendus du festival, car revisitant le roman mythique de Jack Kerouac, un témoignage sur la «Beat Generation», s’avère conventionnel, voire démonstratif. De son côté, le réalisateur britannique Ken Loach, l’un des habitués de Cannes, sombre dans l’insoutenable légèreté cinématographique. Le détail.
On The Road de Walter Salles était le film le plus attendu sur la Croisette. C’est qu’il s’agit d’une adaptation  du livre emblématique de Jack Kerouac qui témoigne d’une époque, celle de la «Beat Generation», mouvement qui a marqué les années 50 en Amérique et qui a libéré la jeunesse des années 60, ébranlant la société américaine dans ses certitudes. Ce nouveau mode de vie a inspiré, notamment, le mouvement de mai 68, les Hippies de Woodstock, l’opposition à la guerre du Vietnam, etc. Rien d’étonnant, donc, à ce que le roman le plus important de Kerouac, publié il y a un demi-siècle, ait tenté un grand nom du cinéma mondial, Francis Ford Coppola, qui en a acheté les droits dans les années 70. Il finira par approcher Godard, Gus Van Sant et d’autres pour leur en confier la réalisation, mais après avoir vu  Carnets de voyage de Salles, c’est à lui que la tâche sera confiée. Il aura fallu huit ans au réalisateur brésilien pour finaliser l’adaptation au cinéma d’un livre connu pour être inadaptable.
Le résultat révèle une œuvre dont le propos se braque davantage sur la période qui a précédé la «Beat Generation» : Sal Paradine (Sam Riley) apprenti écrivain new-yorkais et Dean Moriaty (Garrett Hedlund) ancien prisonnier au charme ravageur, marié à la très libre et séduisante Marylou (Luanne Henderson).  «Entre Sal et Dean, l’entente est immédiate et fusionnelle, décidés à ne pas se laisser enfermer dans le carcan de la vie, ils décident de rompre les amarres et de prendre la route avec Marylou. Assoiffés de liberté, les trois jeunes partent à la rencontre du monde, des autres et d’eux-mêmes... »
Le film s’ouvre sur les chapeaux de roue quand Sal Paradise (Sam Riley) prend place dans une camionnette aux côtés d’ouvriers qui viennent de vivre les années de la Dépression et de la guerre... En maître du road movie (Terre lointaine et Central Do Brasil), Salles nous emmène en voyage à travers les grands espaces sublimés de l’Amérique, filmés toutes saisons confondues, que les deux protagonistes découvrent et apprécient. Ces scènes marquent l’attachement de cette génération à la nature,  l’épopée vers l’ouest, la spiritualité et à la cosmogonie. En parfaite harmonie avec cette nature majestueuse, les personnages se libèrent et vivent des moments d’intense liberté sans contraintes et sans tabous : amour, musique, danse, drogue, conflits, séparation, amitié brisée, la fin d’un rêve...L’important, c’est de privilégier les sentiments  et la vie dans toute sa simplicité sur les préjugés et l’hypocrisie sociale. Irrigué par le jazz, le film swingue entre moments énergiques et silences contemplatifs. Hélas le film,  dont l’une des qualités est le casting, car si bien interprété,  demeure sans point de vue et tombe parfois dans l’illustratif tout en véhiculant une forme, somme toute conventionnelle.  En narrant l’éveil politique et social de deux jeunes Américains, vers la fin des années 40, Salles a su reconstruire et revisiter une époque, qui par plusieurs de ses aspects rappelle tant les temps actuels où sévit la crise économique et une jeunesse cassée qui refuse le poids de l’autorité. Sans plus. 
De son côté, Ken Loach, le réalisateur britannique, présent presque sans discontinuer depuis quelques années,  dans la sélection officielle de Cannes, concourt cette année pour la Palme d’or avec  La part des anges, une comédie sociale où, fidèle à son habitude, il met en scène des personnages de la classe ouvrière méprisée, mais qui fait montre d’ingéniosité et de résistance:   Robbie est un tout jeune père de famille constamment rattrapé par son passé de délinquant, mais sa compagne veut qu’il se rachète une nouvelle conduite pour élever leur fils dans la dignité. Très vite, Loach bifurque vers la comédie et le thriller, signant là un film léger, très léger juste pour le divertissement, une œuvre mineure, mais drôle... Ceux qui s’attendaient à voir le Loach habituel ont vite fait de déchanter. Car c’était un opus juste pour rire et amuser la Croisette. Décidément on attend toujours le grand film du festival.

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