samedi 22 février 2014

La mobilisation est générale

La mobilisation est générale 

...Déclare  Mohamed Ali Laroui, porte-parole du ministère de l’Intérieur, à La Presse

Le terrorisme n’est pas seulement un fléau sécuritaire, mais aussi social et économique. Comment le combattre ? L’Etat est-il prêt à mettre en place une stratégie conséquente en tenant compte non seulement des problèmes de manque d’équipements et de logistique, mais aussi d’ordre idéologique et culturel ? Plus, existe-t-il une réelle volonté politique de lutte contre le terrorisme ?
A toutes ces questions, Mohamed Ali Laroui, porte-parole du ministère de l’Intérieur, apporte des réponses pratiques, claires, précises et chiffrées. Concernant les problèmes d’équipements et de la logistique, l’intervenant explique, chiffres à l’appui, «que dans la foulée de la révolution le ministère de l’Intérieur a vu ses équipements, en transport et infrastructure, partir en fumée. Aussi 1.800 voitures ont-elles été incendiées, 170 postes de police détruits ou incendiés. Nous avons donc besoin de moyens financiers importants afin de remplacer ce qui a été détruit, sans compter le matériel habituel à acquérir».
Mais qu’à cela ne tienne, il semble bien que le ministère de l’Intérieur est convaincu de la nécessité de mener une lutte sans merci contre le terrorisme auquel personne n’était préparé, ni l’Etat, ni les citoyens. C’est pourquoi son porte-parole assure «qu’une stratégie sécuritaire de lutte antiterrorisme est nécessaire certes, mais elle n’est guère suffisante, car elle devrait être soutenue par une stratégie idéologique, conceptuelle, éducative, sociale et cultuelle.
Ce qui demande la contribution de tous : partis, société civile, syndicats, médias, citoyens et l’ensemble des autres ministères».
Concernant maintenant les moyens techniques et scientifiques et les équipements, Mohamed Ali Laroui annonce l’acquisition par le ministère de 40.000 gilets pare-balles qui devraient arriver dans les prochains jours. Outre l’acquisition de véhicules et de voitures et les donations dans le cadre du partenariat avec les Etats-Unis, la Turquie, l’Allemagne, l’Italie et la France».
Et la volonté politique, existe-t-elle vraiment ?
«Cette question de volonté politique n’est pas de mon ressort, mais je peux vous assurer que la volonté sécuritaire existe et nous sommes tous mobilisés entre forces de sûreté intérieure, Garde nationale, policiers, douaniers, Protection civile et armée pour combattre le fléau du terrorisme», rassure M. Laroui.

Sept terroristes arrêtés
Concernant les questions d’actualité, le porte-parole du ministère de l’Intgérieur nous a appris que «les opérations de ratissage se poursuivent aux monts Selloum et Chaâmbi avec des opérations de bombardement ciblées par les unités de la sûreté et de la Garde nationale, en totale coopération avec l’Algérie. Sept individus ayant apporté des soutiens logistiques et alimentaires à la trentaine de terroristes retranchés au Chaâmbi ont été arrêtés». A la question de savoir si le niqab sera interdit, le porte-parole répond que «la loi sera appliquée et que personne n’est au-dessus de tout contrôle et que des mesures seront annoncées bientôt».
Quant aux 300 agents de police limogés après la révolution et qui sont actuellement en sit-in devant le ministère de l’Intérieur, il a été convenu que les dossiers de 70 d’entre eux seront étudiés au cas par cas, contrairement à ceux qui ont des affaires en justice, en attendant le jugement. Cette affaire est entre les mains des syndicats de la police.
Et l’affaire des nominations partisanes au sein du ministère, soulevées par certains partis de l’opposition, seront-elles révisées ?
«Cela est du ressort, en premier lieu, du ministre de l’Intérieur selon la nécessité et la marche du travail».


La lutte antiterrorisme en chiffres

– Acquisition de 40.000 gilets pare-balles.
– Des centaines de jihadistes en Syrie, 10 ont été arrêtés à leur retour au pays.
– Les dossiers de 70 agents de police parmi les 300 limogés sont à l’étude par les syndicats de la sûreté.
S.D.

ELECTIONS

Faudrait-il que Marzouki et Ben Jaâfar démissionnent ?
LA proposition invitant Ben Jaâfar et Marzouki à démissionner, s’ils ont l’intention d’être candidats à la prochaine présidentielle, provoque un chaud débat à l’hémicycle du Bardo
La proposition faite, mercredi dernier, par le constituant Mohamed Karim Krifa, membre de la commission de législation générale au sein de l’Assemblée nationale constituante (ANC), ayant trait à l’article 21, a suscité l’intérêt, voire une polémique. Le député d’Al Moubadara ayant proposé «l’empêchement des présidents de la République, Moncef Marzouki et de l’ANC, Mustapha Ben Jaâfar, sur la base de l’article 21 consacré aux interdits de candidature aux élections législatives». Le député a estimé que «leurs chances aux prochaines élections sont plus grandes, étant donné l’utilisation des moyens de l’Etat, entre transport, surveillance policière, outre qu’ils jouissent de leur statut actuel dans leurs déplacements à l’intérieur et à l’extérieur du pays».
Pour en savoir plus, nous  avons approché Mohamed Karim Krifa, qui nous a présenté tout un argumentaire : «Ecoutez, l’un des principes de la nomination du président du gouvernement actuel Mehdi Jomâa est qu’il ne peut, avec tout son gouvernement, se présenter aux prochaines élections législatives et/ou présidentielle. Par conséquent et en adéquation, les deux autres présidents ne peuvent se présenter aux prochaines élections s’ils ne démissionnent pas actuellement. Cela afin qu’il ne puissent pas mener une campagne électorale prématurée sur le dos du contribuable en utilisant les deniers publics et en exploitant leurs postes aux dépens de l’équité et de l’impartialité administrative. On ne peut accepter aujourd’hui ce qu’on a reproché hier à Ben Ali qui exploitait, selon son bon vouloir, toutes les institutions de l’Etat, y compris les médias.
Est-il normal que Mustapha Ben Jaâfar dédicace le «Destour» portant le logo d’Ettakatol ? Est-que la Constitution appartient uniquement à ce parti ? Ou est-ce normal qu’il se déplace à Jendouba dans une sorte de campagne électorale d’Ettakatol qui ne dit pas son nom, alors qu’il est président de l’ANC ? Idem pour le président provisoire Moncef Marzouki, également président d’honneur du CPR, qui a pioché dans des archives ne lui appartenant pas pour imprimer son «Livre noir» avec les derniers de l’Etat. Sachez qu’en France, lors de la dernière présidentielle, on a également reproché au candidat sortant Nicola Sarkozy d’avoir utilisé les moyens de l’Etat, mais toutes les dépenses qu’il a faites ont été évaluées et comptabilisées et son parti a dû rembourser 12 millions d’euros, soit 27 milliards de nos millimes. J’exigerai, donc, une évaluation et une restitutions des dépenses des campagnes électorales prématurées des deux présidents qui ont joui des avantages de leurs postes, ce qui porte un coup à l’équité et l’égalité des chances entre tous les candidats».

Garantir l’impartialité et l’égalité des chances

Interrogé sur la question, Samir Taïeb, porte-parole d’Al Massar, a, de son côté, relevé que «Mustapha Ben Jaâfar a déclaré qu’il allait mettre de l’ordre dans la maison Ettakatol. Et là il s’exprime en tant que président de son parti et c’est son  droit, mais alors qu’il quitte la présidence de l’ANC, s’il a l’intention de se représenter aux prochaines élections, afin de garantir l’objectivité et l’impartialité exigées. Nous n’avons aucun problème ni avec Ben Jaâfar ni avec Marzouki, mais pour des raisons de loyauté et d’éthique ils devraient démissionner s’ils comptent se porter candidats aux prochaines élections».
Mais ce n’est pas là l’avis de certains députés du CPR dont Samir Ben Amor qui a déclaré, mercredi dernier, sur Mosaïque FM, «que le député Karim Krifa parle des conditions de candidature à la présidentielle alors que nous discutons des  conditions de candidature aux législatives. Cela côté forme.
Côté contenu, le constituant a qualifié la proposition du député d’Al Moubadara «de bidaâ», une sorte d’invention, pour empêcher Marzouki et Ben Jaâfar de se présenter aux élections en raison de la  crainte notamment des chances importantes du président de la République aux prochaines élections, vu la confiance dont il jouit auprès du peuple. C’est pourquoi on veut l’empêcher de se porter candidat».
Or Mohamed Karim Krifa est catégorique : «Je ne parle ni des législatives ni de la présidentielle, mais de l’utilisation de la logistique  administrative de l’Etat non pas dans l’intérêt du peuple ou de l’Etat mais à des fins purement personnelles et électoralistes étroites anticipées».

Polémique sur la proposition d’interdiction de candidatures 

Par ailleurs, des députés de la Troïka dont Samir Ben Amor du CPR et Yamina Zoghlami d’Ennahdha, ainsi que Samia Abbou du Courant démocratique, ont présenté une proposition d’interdiction de candidature dans la loi électorale, en se basant sur l’article 15 du décret-loi n° 3 organisant les élections de l’ANC. Or, les interdictions sont contraires à l’esprit et à la lettre de la Constitution et touchent à l’essence même du droit des personnes. Selon l’article 49 du «Destour», les interdictions de candidatures ciblent les anciens dirigeants du régime de Ben Ali, ainsi que les anciens adhérents du RCD, comme l’avait stipulé l’article 15 du décret-loi n° 35 organisant les élections de l’ANC.
Or, la majorité des députés, tel Mohamed Karim Krifa du Parti initiative nationale et destourienne (Moubadara), trouve cette proposition «inconstitutionnelle». Pourquoi ? Explication du député : «Je me base sur des articles de la nouvelle Constitution, tel l’article 49 (chapitre droits et libertés fondamentaux), stipulant explicitement que les interdictions dans les lois ne doivent pas toucher à l’essence des droits, sachant que la candidature pour diriger le pays est un droit inaliénable pour tous les Tunisiens. Sachez maintenant que Zied Lâadhari, porte-parole d’Ennahdha a jugé que les propositions d’interdiction de candidatures «n’engagent que leurs auteurs».

Et l’instance de contrôle de la constitutionalité des lois ?
De plus, la question principale qui se pose concernant l’interdiction dans la loi électorale est la suivante : est-ce qu’il faut élaborer une loi électorale avant ou après l’instauration d’une instance pour contrôler la constitutionnalité, des lois ? Ce à quoi Mohamed Karim Krifa répond : «En se référant à l’alinéa 7 de l’article 149 de la Constitution dans le chapitre «les mesures transitoires» , on relève qu’il stipule  que l’ANC doit approuver dans un délai de 3 mois à partir de la date de la promulgation de la Constitution une loi organique qui a pour but l’instauration d’une instance provisoire dont la mission est le contrôle de la constitutionnalité des lois, soit au maximum le 25 avril en attendant la création de la Cour constitutionnelle.
Or, la commission de la législation générale au sein de l’ANC  est en train d’étudier le projet de loi portant sur «les élections» où il y a beaucoup de divergences sur les conditions de candidatures soit pour «la Chambre des députés du peuple», soit pour la présidence de la République».
Mais il est sûr, ajoute le député d’Al Moubadara, «que l’instance de contrôle de la constitutionnalité demeure primordiale et doit être instaurée et mise en exécution avant le 25 avril 2014, et avant même toute approbation de n’importe quelle loi pour la simple raison que le délai stipulé par l’article 120 de la Constitution est de sept jours afin que l’instance statue sur une affaire portée contre une loi. Il est donc normal que l’instance soit mise en place avant toute promulgation de loi.
Cependant, un autre article peut être pris en compte, c’est l’article 3 qui stipule explicitement que la souveraineté absolue revient au peuple. Ce qui veut dire obligatoirement que le peuple tunisien est libre de choisir ses dirigeants et n’a nullement besoin d’une tutelle qui limite ses choix».
Voilà qui augure de chaudes discussions au sein de la commission de la législation générale en particulier et de l’ANC en général.
Samira DAMI

vendredi 14 février 2014

Célébration de la ratification de la Constitution , Les raisons de l'absence de Mahmoud Abbés

Lors de la cérémonie officielle de célébration de la ratification de la Constitution qui s’est déroulée le 7 février à l’Assemblée nationale constituante (ANC), en présence d’un grand nombre de chefs d’Etat et de présidents de Parlements arabes, africains et européens, et autres invités de par le monde, les observateurs ont remarqué l’absence du président palestinien Mahmoud Abbas. D’aucuns s’interrogent sur les raisons de cette absence. Des sources dignes de foi affirment que le président provisoire de la République Moncef Marzouki «n’a pas adressé une invitation officielle à son homologue palestinien».
Plusieurs observateurs se sont demandé «si Moncef Marzouki a agi de la sorte afin de contenter le mouvement Ennahdha, lequel, selon eux, appartient à la même mouvance politique et idéologique que le Premier ministre Ismaël Hania, chef du Hamas ?»
Ainsi le seul pays, selon les mêmes sources dignes de foi, à n’avoir reçu qu’une seule invitation : celle adressée par le président de l’ANC, Mustapha Ben Jaâfar, à son homologue Selim Zaânouni, lequel s’est fait représenter par le vice-président du Conseil national palestinien (CNP) (Ndlr : Parlement) Azzem Al Ahmed.
L’absence du président du CNP exprimerait-il un message de mécontentement politique de la part de l’autorité officielle palestinienne ?
Ce manque de clairvoyance, selon plusieurs observateurs politiques, ne s’inscrit pas dans la tradition diplomatique tunisienne à l’égard de la Palestine. La Tunisie a toujours soutenu le pouvoir central palestinien sans jamais s’ingérer dans les affaires internes palestiniennes.
Et cette tendance politique — sans aucun consensus, du reste, des partis politiques et du peuple tunisien — à vouloir faire pencher la balance en faveur du parti Hamas a vu le jour depuis le 23 octobre 2011.
A preuve, l’exemple suivant dans le domaine de l’enseignement supérieur, le gouvernement tunisien a toujours accordé un nombre important de bourses d’études adressées à l’Autorité palestinienne. Or, pour l’année universitaire 2013-2014, l’ancien ministre de l’Enseignement supérieur, Moncef Ben Salem, a accordé 26 bourses d’études adressées au gouvernement du Hamas, contre seulement 5 bourses accordées à l’autorité officielle palestinienne. Sans compter d’autres exemples traduisant le parti pris de l’ancien gouvernement en faveur du Hamas.
Le nouveau gouvernement Mehdi Jomâa, tous ministères confondus, révisera-t-il cette politique d’interférence dans les affaires intérieures palestiniennes, en réinstaurant la diplomatie équilibrée et perspicace traditionnelle tunisienne à l’égard de la Palestine et d’autres pays, qui nous a toujours valu le respect international ?

SAMIRA DAMI 
Ajouté le 11-02-2014

vendredi 17 mai 2013

Sécurité intérieureLe syndicat hausse le ton


 • Manifestation des forces de sécurité intérieure devant l’ANC

Les membres du Syndicat national des forces de sécurité intérieure accompagnés des agents de la Garde nationale, des institutions pénitentiaires  et de la Protection civile ont manifesté, hier, avec leurs familles devant l’Assemblée nationale constituante (ANC), revendiquant droits, protection  et des équipements adéquats et efficaces dans l’exercice de leurs fonctions.
C’est suite aux événements dramatiques survenus à Jebel Chaâmbi, dans le gouvernorat de Kasserine les 29 et 30 avril et qui se sont soldés par 13 blessés dont quatre grièvement, que cette manifestation a été décidée.
Contacté, Nabil Ayari, secrétaire général du Syndicat national des forces de sécurité intérieure, évoque pour La Presse les principales revendications de la manifestation : «Nous revendiquons en substance la neutralité de l’institution sécuritaire afin d’instaurer une police républicaine qui soit au service de la République et non du gouvernement. Nous demandons également la protection juridique de la profession, la révision de l’indemnité de risque et l’adoption de la loi sur l’indemnisation des accidents du travail qui existait depuis 1995, mais qui a été supprimée par la suite.
Nous revendiquons également la non-suspension des salaires de nos collègues morts suite à des accidents du travail ou de la route, tels Anis Jelassi et Marwa Brini, du fait qu’ils soient célibataires, ce qui est injuste. On se demande aussi quel sera le sort de nos collègues blessés à Jebel Chaâmbi ?».
C’est pourquoi, selon notre interlocuteur, il est plus que jamais nécessaire d’inscrire les droits des agents de sécurité intérieure dans la Constitution et de criminaliser toute agression contre les forces sécuritaires. Le Syndicat des forces de sécurité intérieure dénonce, d’autre part, le laxisme des autorités face à l’extrémisme et au terrorisme rampants.
Nabil Ayari note que «les Tunisiens doivent prendre conscience des risques patents du terrorisme et doivent se mobiliser autour des forces de sécurité pour endiguer ce fléau qui doit être combattu par l’ensemble des citoyens. Car la réussite de la transition démocratique, aussi bien aux plans politique qu’économique, est intimement liée à l’instauration de la sécurité. D’ailleurs, ce n’est pas gratuitement que nos collègues ont lancé, lors de la manifestation de protestation ce slogan : ‘‘Citoyen, réveille-toi, le terrorisme a investi le pays’’. C’est une sorte d’appel aux citoyens afin qu’ils les soutiennent avec toute la vigilance requise en les aidant à lutter contre la violence et le terrorisme».

Pour une institution sécuritaire républicaine

Trois représentants du Syndicat national des forces de sécurité intérieure, dont Nabil Ayari, le secrétaire général, et le porte-parole Chokri Hamada, ont rencontré la vice-présidente de l’ANC, Meherzia Laâbidi, pour présenter leurs revendications par écrit : «Au cours de cette rencontre la vice-présidente, qui n’était pas informée de nos revendications et des dossiers que nous avons envoyés au président de l’ANC, Mustapha Ben Jaâfar, nous a promis qu’elle enverra une correspondance au ministre de l’Intérieur pour qu’il soit auditionné devant l’ANC», affirme Nabil Ayari.
Les représentants des forces de sécurité intérieure ont également rencontré des députés, en majorité du groupe démocratique, afin de les informer de leurs conditions de travail et de leurs principales revendications.
Selma Baccar, constituante d’Al Massar qui était parmi le groupe de députés ayant reçu les représentants des agents de sécurité intérieure,  nous a indiqué que la rencontre a porté sur les conditions de travail, ainsi que sur les revendications des forces de sécurité intérieure : «La rencontre a été édifiante en ce sens que nous avons été informés des conditions de travail de ces agents qui manquent outrageusement d’équipements et de moyens adéquats pour lutter contre le terrorisme et qui sont envoyés à l’aventure tels des boucs émissaires, sans directives précises.
D’où leur demande pressante d’inscription de leurs droits dans la Constitution et de neutralité de l’institution sécuritaire, afin qu’elle soit non pas au service de l’exécutif ou d’un parti quelconque, mais au service du citoyen.  Autrement dit, les forces de sécurité revendiquent une police républicaine. Les représentants ont par ailleurs manifesté leur détermination à conjuguer tous leurs efforts pour protéger le pays, en luttant contre la violence et le terrorisme d’où qu’ils viennent. Dans ce but, ils nous ont exhortés à faire pression sur le gouvernement pour l’amélioration de leurs conditions de travail».
Quel a été, enfin, le résultat de cette rencontre des représentants des forces de sécurité avec les constituants ?
Selma Baccar affirme qu’il leur a été demandé «de fournir aux députés un projet et des revendications unifiés de tous les syndicats afin qu’ils soient soumis à l’ANC».
Enfin, concernant la constitutionalisation de l’institution sécuritaire, notre interlocutrice souligne : «Dans l’avant- dernière mouture du “Destour”, cette constitutionalisation existait, mais dans la dernière copie elle a été revisitée, la notion de police républicaine a été gommée. Mais on y reviendra».

 Un commissaire de police retrouvé égorgé
Un jeune commissaire de police âgé de 35 ans a été retrouvé, hier matin à Jebel Jelloud, égorgé, le pied gauche amputé. Ce cadre sécuritaire travaillait au centre de formation des agents de sécurité de Carthage-Salammbô.
Interrogé sur ce crime, Nabil Ayari, secrétaire général des forces de sécurité intérieure, nous a indiqué qu’une enquête est en cours pour déterminer les circonstances de ce meurtre.
Auteur : Samira DAMI
Ajouté le : 03-05-2013

66e édition du festival de CannesEntre identités et engagements


 Le Franco-Tunisien Abdellatif Kechiche pour la première fois sur la Croisette avec La vie d’Adèle, l’un des films les plus attendus du festival.

Dans une dizaine de jours, soit du 15 au 26 mai, s’ouvrira le 66e festival de Cannes avec Gatsby le magnifique du réalisateur australien Baz Luhrmann, interprété par Leonardo Di Caprio. Le film sera présenté en hors compétition, avant que ne soit entamée, le lendemain, la projection des 20 films en lice pour la Palme d’or.
En se focalisant sur la liste, on relève parmi les longs métrages sélectionnés —sur 1.857 proposés—, deux films représentant le continent africain, d’où sont originaires leurs réalisateurs respectifs. Il s’agit de La vie d’Adèle du Franco-Tunisien Abdellatif Kechiche et GrisGris du Franco-Tchadien Mahamet Salah Haroun.
Kechiche est l’une des figures du renouveau du cinéma français, grâce à ses films d’auteur, façon «free-cinema», tels l’Esquive, La graine et le mulet ou encore le remarquable Vénus noire. Tous ont obtenu un succès certain, notamment la reconnaissance de la critique, ainsi que celle de ses propres pairs. La plupart de ses films ont raflé moult récompenses dont le grand prix du jury à la Mostra de Venise en 2006 pour La graine et le mulet et quatre Césars autant pour ce dernier que pour l’Esquive. Avec La vie d’Adèle, campé par Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos, Kechiche fera pour la première fois la rituelle montée des marches. Le plus long de la compétition avec une durée de 3h07, ce film sera, sans doute, l’un des plus attendus de la sélection officielle.
Quant à Mahamet Salah Haroun qui est déjà allé à Cannes en 2010, il retourne sur la Croisette avec GrisGris où il met en scène un jeune qui rêve de devenir danseur, mais la maladie de son oncle changera ses plans.
L’Iranien Asghar Farhadi, oscarisé pour l’excellent Une séparation, viendra défendre Le Passé, mettant en scène un Iranien empêtré dans son divorce. Le film est interprété par deux acteurs français, Bérénice Béjo et Tahar Rahim.

Jarmusch, le dernier annoncé 

Only lovers left alive du réalisateur américain Jim Jarmusch a été le dernier film annoncé par les organisateurs du festival de Cannes. Il a été ajouté le 26 avril, plus d’une semaine après l’annonce de la liste des films au cours de la conférence de presse du 18 avril. Cet opus qui met en scène des vampires est interprété par Tilda Swinton, Tom Hiddleston et John Hurt.
 Le réalisateur avait remporté la Caméra d’or à Cannes en 1984 pour Stranger than paradise et le Grand prix du jury en 2005 pour Broken flowers.
Le reste de la sélection officielle comporte des habitués de la Croisette dont les frères Coen, Ethan et Joel, déjà palmés en 1991 avec Barton Fink et qui reviennent avec Inside Llewyn Davis évoquant la vie d’un chanteur folk dans le Greenwich Village new-yorkais des années 60. Steven Soderbergh, Palme d’or en 1989 avec son premier long-métrage, Sexe, mensonges et vidéo, sera de retour avec Behind the candelabra campé par Michael Douglas et Matt Damon. L’Italien Paolo Sorrentino qui a obtenu le prix du Jury avec Il Divo en 2008, présentera son nouveau-né La Grande Belleza.
Outre La vie d’Adèle de Kechiche, cinq autres films français sont en lice pour la Palme d’or. Le Franco-Polonais Roman Polanski présentera La Vénus à la fourrure, avec Mathieu Amalric et Emmanuelle Seigner, inspiré du roman érotique de Leopold Sacher-Masoch, qui a donné son nom au masochisme. Polanski avait remporté la prestigieuse Palme d’Or en 2002 avec Le Pianiste.
Jeune et Jolie de François Ozon brosse le portrait d’une jeune fille de 17 ans en quatre saisons et quatre chansons. Valeria Bruni-Tedeschi, sœur de Carla Bruni, est la seule femme à concourir pour la récompense suprême avec Un château en Italie. Arnaud Desplechin présente Jimmy P. et pour la première fois en compétition, Arnaud des Pallières concourt avec Michael Kohlhaas.
A la lumière de ces opus, «Cannes 2013 ne sera pas politique comme cela a pu être le cas dans le passé mais traitera, cette fois, des identités, des engagements, et des vies intimes des individus», a déclaré Thierry Frémaux, le délégué général du festival. Pour la montée des célèbres marches, on annonce déjà Leonardo DiCaprio, Matt Damon, Robert Redford, Ryan Gosling, Benicio del Toro, Michael Douglas, Bérénice Bejo, Nicole Kidman et autres.
Les organisateurs du festival annoncent également 14 films dans la section «Un certain regard», outre ceux qui sont projetés hors compétition ou en séances spéciales.
Le jury de cette 66e édition est présidé par Steven Spielberg, l’auteur notamment de E.T. et de La couleur pourpre. Il sera épaulé dans sa mission par huit membres, à savoir les actrices Nicole Kidman (Australie) et Vidya Balan (Inde), les acteurs Daniel Auteuil (France) et Christopher Walz (Autriche), les réalisatrices Naomi Kawase (Japon) et Lyne Ramsay (Grande-Bretagne) et les réalisateurs Ang Lee (Taiwan) et Cristian Mungiu (Roumanie). Ils annonceront leur verdict le 26 mai, lors de la soirée de clôture.

 En compétition pour la Palme d’or
Only God Forgives, de Nicolas Winding Refn.
Borgman, de Alex Van Warmerdam.
The great Beauty, de Paolo Sorrentino.
Behind the Candelabra, Ma vie avec Liberace, de Steven Soderbergh.
La Vénus à la fourrure, de Roman Polanski.
Nebraska, d’Alexander Payne.
Jeune et jolie, de François Ozon.
Shield of Straw, de Takashi Miike.
La vie d’Adèle, de Abdellatif Kechiche.
Like Father Like Son, de Kore-Eda Hirokazu.
Touch of sin, de Jia Zhang Ke.
GrisGris, de Mahamat-Saleh Haroun.
The immigrant, de James Gray.
Le passé, d’Asghar Farhadi.
Heli, d’Amat Escalante.
Jimmy P., d’Arnaud Desplechin.
Michael Kohlhaas, d’Arnaud Des Pallières.
Inside Llewyn Davis, de Ethan Coen, Joel Coen.
Un château en Italie, de Valeria Bruni Tedeschi.
Only Lovers left alive, de Jim Jarmusch.

S.D. Ajouté le 6/05/13

Interview - Othman Jerandi, ministre des Affaires étrangères, à La Presse

«Diplomatie de grand bruit ne rime pas forcément avec efficacité»


 Deux mois après son investiture à la tête de la diplomatie tunisienne, Othman Jerandi estime que «diplomatie de grand bruit ne rime pas  forcément avec efficacité». Servir et défendre les intérêts du pays, redonner confiance à nos partenaires, replacer la Tunisie à la place qui lui revient sur l’échiquier mondial restent les domaines prioritaires de l’action diplomatique tunisienne.
Sollicité depuis un mois, le ministre des Affaires étrangères nous a, enfin, accordé une interview dans laquelle  il apporte des éclairages  sur les grandes questions  brûlantes et les dossiers prioritaires qui concernent la Tunisie : le sort des émigrés clandestins en Italie et de la colonie tunisienne en Syrie, la construction de l’Union du Maghreb Arabe, l’image du pays à l’étranger après les multiples  événements qu’il a connus et autres. Interview.

Durant les quelques mois qui nous séparent des prochaines élections, quels sont les dossiers prioritaires auxquels s’attelle le ministère ?
Le département a un rôle de premier plan à jouer dans cette phase importante de la  transition démocratique de notre pays.
A la veille de la mise en place des institutions constitutionnelles permanentes et à la lumière des défis de l’instant, nos actions et démarches au niveau du ministère pourraient être classées en deux grandes catégories :
- Un volet diplomatique et politique, qui concerne nos contacts et démarches visant à restituer la confiance de nos partenaires étrangers dans ce processus transitoire et à tisser des relations fortes, privilégiées et basées sur le respect et les intérêts mutuels.
- Un volet économique, dans le cadre duquel nous  œuvrons  à mettre à profit le réseau de nos relations avec les pays frères et amis en vue d’appuyer les efforts visant à trouver des solutions adéquates  aux questions qui préoccupent notre société, à l’instar de l’emploi des jeunes, l’émigration, ou le développement des régions intérieures.
Dans ce même contexte, nous accordons un intérêt particulier aux dossiers de la restitution des avoirs mal acquis et l’extradition des inculpés parmi les symboles du  régime déchu et leurs proches. Ce sont des questions qui sont directement liées à la justice transitionnelle, mais ayant également un impact économique immédiat, et elles constituent par conséquent des constantes dans nos actions. Nous essayons chaque jour de surmonter les difficultés, mais c’est aussi un travail de longue haleine qui, objectivement, et comme dans toutes les expériences de transition démocratique, requiert patience et persévérance. Les résultats restent cependant tributaires de l’étendue de la coopération et de la disponibilité des pays concernés à nous aider et de leur volonté d’accélérer les procédures applicables.
 Si, pour ce qui est  de la restitution des avoirs, le Liban, l’Espagne, l’Italie et d’autres pays s’imposent comme  des cas exemplaires d’une coopération positive que nous valorisons, d’autres comme les Seychelles illustrent les difficultés que nous rencontrons. Nous avons déploré la manière par laquelle ce pays ami a répondu à nos démarches et j’ai moi-même initié un contact avec le MAE seychellois pour lui faire part de la position ferme de notre pays et insister sur le droit de tous les Tunisiens à voir les inculpés du régime déchu dans des affaires de corruption extradés et jugés en Tunisie.
Cela dit, je voudrais rassurer nos chers concitoyens que nos efforts, en collaboration avec les hautes instances de l’Etat et les départements spécialisés, ont été porteurs de résultats tangibles: les accords financiers, les dons, tels que ceux récemment signés avec le Japon et l’Allemagne, la reconversion ou le recyclage de certaines dettes extérieures, la restitution de certains avoirs, etc. en témoignent. Certes, beaucoup reste à faire, mais nous sommes déterminés à poursuivre nos efforts dans la même perspective d’interaction positive avec les aspirations du peuple tunisien et ses besoins, ainsi que dans le même souci d’efficacité pour réaliser les objectifs escomptés.

La Turquie et le Qatar sont deux pays qui montent en première ligne dans le domaine de la coopération bilatérale avec la Tunisie. Cette nouvelle donne annoncera-t-elle un changement de cap dans la diplomatie tunisienne ?
Notre diplomatie est caractérisée par son ouverture à l’image de notre civilisation et de notre peuple. Si nous visons une diplomatie dynamique, réaliste et équilibrée, à même d’apporter des opportunités à l’économie du pays  et d’améliorer les conditions des Tunisiens, nous devons préserver cette ouverture et œuvrer à promouvoir nos relations avec non seulement nos partenaires traditionnels mais aussi avec les pays arabes, musulmans, africains et ceux des espaces asiatique et américain. 
La dynamique enregistrée dans les relations de la Tunisie avec la Turquie et le Qatar s’insère dans cette logique, mais également dans le cadre de l’enracinement de la Tunisie dans sa profondeur géographique et historique et la consécration de sa  réconciliation avec son identité arabo-islamique.                                                                                    
Vous savez que la Turquie et le Qatar étaient parmi les premiers pays à exprimer leur soutien à la volonté du peuple tunisien de recouvrer sa liberté et sa dignité, et à appuyer la Tunisie dans sa phase de transition démocratique en apportant leur aide aux efforts de développement, d’investissement, et d’emploi dans notre pays.
C’est ainsi que la Turquie a réservé une aide financière estimée à 500 millions USD (environ 825 millions de dinars) et s’est engagée avec nous dans des accords de coopération technique et de développement portant sur différents secteurs prioritaires. Tel est le cas pour le Qatar, dont le montant global des transferts financiers au profit de la Tunisie après la révolution a atteint fin mars 2013 un milliard et 300 millions de dollars US (490 millions de dinars environ) sous forme de crédits et de dons ou des investissements dans plusieurs domaines, en plus du financement des projets bénévoles en Tunisie et notamment dans les régions intérieures.
Par ailleurs, je tiens à préciser que dans une Tunisie qui a payé cher le prix de sa liberté, il est impensable de contester l’autonomie de sa décision politique et  l’attachement ferme et fort à sa souveraineté. Nos relations avec tous les pays, sans exception, sont basées sur ce principe sacro-saint du respect mutuel de la souveraineté de chacun. Aucun doute ne devrait effleurer les esprits de nos chers concitoyens concernant cette question, car nous optons pour le principe de zéro tolérance  pour ce qui est de notre indépendance, notre souveraineté nationale, nos choix stratégiques et notre pouvoir de décision.

Mais ces deux pays ont bénéficié d’avantages économiques en Tunisie, et le Qatar, par exemple, nous a accordé des crédits à des taux élevés, supérieurs même à ceux pratiqués par le Japon ?
Je dois préciser que chaque opération obéit à une logique et à des paramètres spécifiques. L’important c’est que dans ce genre d’opérations «win-win» (gagnant-gagnant), la Tunisie trouve son compte d’autant que les relations avec le Qatar sont excellentes. En témoigne la création récente du fonds d’amitié qatari qui vient d’accorder à la Tunisie un don sous forme de prêt de 100 millions de dollars US (environ 170 millions de dinars) pour promouvoir les microcrédits et les projets initiés par les jeunes.
D’ailleurs, ce même fonds a apporté son concours en France et au Japon.

Comment expliquez-vous la reconnaissance, que certains ont considéré comme dictée par des tierces parties, de la coalition de l’opposition syrienne alors que le conflit n’en finit pas de s’éterniser ?
La reconnaissance par la Tunisie de l’alliance de l’opposition syrienne s’est effectuée en coordination avec la position arabe et en droite ligne avec les orientations internationales majoritaires. Malgré les divergences au sein de la coalition, et bien qu’elle ne regroupe pas toutes les composantes de l’opposition syrienne, elle a été considérée comme  le représentant légitime, non l’unique, du peuple syrien et un interlocuteur essentiel de la Ligue des Etats arabes.
Par ailleurs, nous considérons que  toute intervention militaire extérieure en Syrie constitue une ligne rouge pour la Tunisie, et c’est pour cette même raison que notre pays a soutenu les efforts de l’opposition syrienne dans la coordination de son action et l’unification de sa position dans la perspective d’une transition démocratique qui préserve la Syrie de l’effusion de davantage du sang et la met à l’abri de tout danger d’une éventuelle guerre civile qui aurait des conséquences néfastes sur toute la région.
La ferme condamnation de l’agression israélienne contre la Syrie exprimée récemment par la Tunisie , s’inscrit dans le cadre d’une position de principe basée sur le respect de l’intégrité du territoire syrien.
Depuis le début de la crise syrienne, et malgré la croissance tragique du nombre des victimes, des sans-abri et des réfugiés, la Tunisie n’a cessé d’inciter toutes les parties à aboutir à une solution pacifique qui garantisse au peuple syrien frère son droit légitime à la liberté et à l’instauration d’un régime démocratique. Il va sans dire que nous refusons de voir une Syrie détruite et déchirée par la guerre avec toutes les conséquences imaginables sur une région dont la stabilité et la sécurité restent toujours extrêmement fragiles. C’est dans ce souci que nous continuerons à travailler avec l’ensemble de la communauté internationale en vue de favoriser la résolution politique du conflit, et épargner ainsi à la Syrie davantage de pertes humaines et de destructions.

Quels sont les moyens possibles pour établir des canaux de communication avec la communauté tunisienne en Syrie afin d’avoir une meilleure perception sur le sort de nombreux jeunes utilisés comme chair à canon dans la guerre en Syrie
Depuis ma prise de fonctions, j’ai vu qu’il était impératif de réfléchir sur les moyens à même de contourner les difficultés objectives imposées par la situation dans son ensemble : nous avons des ressortissants qui fuient les affrontements militaires, une demande accrue sur les prestations consulaires et les différentes formes d’assistance, mais aussi des jeunes Tunisiens qui sont impliqués dans le conflit armé en Syrie avec toutes les douleurs et les souffrances que cela a engendrées  chez leurs familles et la société tunisienne tout entière.
La première mesure que nous avons prise au ministère était le renforcement du personnel de l’ambassade de Tunisie à Beyrouth par un diplomate et un agent local afin de lui permettre d’assurer, dans les meilleures conditions possibles, l’encadrement des ressortissants tunisiens en Syrie et de leur fournir les prestations dont ils ont besoin. Notre objectif essentiel est de garder opérationnel le canal de la communication avec nos compatriotes en Syrie.
Au niveau du département, nos structures compétentes sont en train d’accueillir les familles des jeunes Tunisiens ou celles de nos ressortissants en Syrie. Leur devoir est d’assurer une bonne coordination avec les autres ministères concernés et de prêter l’assistance nécessaire à ces familles et nous essayons périodiquement de parfaire ces prestations et de remédier aux carences d’informations et à la complexité de la question.
Toutes les décisions prises à cet effet s’insèrent dans le cadre d’un effort global visant à trouver une solution durable à ce problème. Le ministère, un des intervenants dans ce dossier, reste à la disposition des organisations de la société civile créées à cet effet pour rassurer les familles de nos jeunes, les défendre ou leur fournir l’assistance nécessaire.

Pensez-vous que l’antenne créée à Beyrouth est suffisante pour traiter tous les dossiers et répondre à toutes les demandes  des tunisiens qui vivent dans l’illégalité en Syrie, parce que sans papiers ? 
Notre colonie établie en Syrie depuis des générations a besoin de pièces d’identité, laissez-passer et autres services. C’est pourquoi nous avons renforcé nos services  à Beyrouth pour toute opération consulaire. Nous avons d’ailleurs facilité le rapatriement de cinq personnes.

Etant donné que les Américains et les pays occidentaux commencent à reconsidérer leur position sur la crise syrienne, la Tunisie va-t-elle faire de même en cherchant à rétablir les ponts?
Si la situation évolue dans un sens ou dans l’autre, la décision tunisienne suivra, car notre pays s’est toujours inscrit dans la logique du dialogue en préservant nos intérêts. Nous sommes également pour le principe sacro-saint de l’indépendance, de l’intégrité territoriale de la Syrie et du règlement pacifique du conflit.
Après les accords intervenus lors des discussions de Genève 1 entre tous les protagonistes, l’idée d’un Genève 2 a émergé. La réunion préparatoire des «Amis de la Syrie» se tiendra vers la mi-juin en Jordanie.

Le processus de construction de l’Union du Maghreb arabe semble marquer le pas. L’initiative du président provisoire, annoncée en 2012 et portant sur la tenue d’un sommet maghrébin, ne semble pas recueillir une quelconque unanimité dans la région. Au regard de la situation qui prévaut dans la région, pensez-vous que ce dossier est définitivement clos ?
Je viens de rentrer de Rabat, où j’ai participé à la réunion des MAE de l’UMA. J’ai eu des concertations approfondies avec tous mes homologues maghrébins et je peux vous dire qu’il y a une convergence sans équivoque sur l’importance que représente une intégration maghrébine réussie aujourd’hui. Tous les pays de l’UMA sont bien conscients qu’il n’y a pas d’alternative à ce processus étant donné les défis sécuritaires de taille que nous rencontrons tous et les exigences posées par une conjoncture économique régionale et mondiale difficile.
Par conséquent, ce dossier n’est point clos… L’UMA constitue toujours pour tous nos pays un rêve et un projet collectif... Nous aspirons tous à une Union qui serait au diapason de l’époque et des attentes de nos peuples. La Tunisie croit fortement en ce projet et le perçoit comme un choix stratégique. Ainsi, l’initiative du président de la République  provisoire s’inscrivait dans cette logique et nos frères maghrébins apprécient les efforts de la Tunisie en vue de relancer le processus de l’UMA à travers notamment la tenue d’un sommet. Les chefs d’Etat de l’UMA poursuivent leurs consultations dans ce sens.
Cela dit, les activités sectorielles dans le cadre de l’UMA continuent leur cours habituel et à un rythme soutenu, avec notamment des projets en perspective et des programmes de coopération prometteurs... Parmi les décisions arrêtées récemment, nous serons très probablement en mesure, d’ici la fin de l’année, d’annoncer l’établissement de la Banque maghrébine de développement.

L’opacité qui entoure le sort des Tunisiens émigrés clandestinement depuis 2011 en Italie suscite encore colère, attente vaine et questionnement des familles toujours en quête d’informations fiables. Ce dossier a-t-il évolué et comment comptez vous y apporter des solutions, notamment avec la partie italienne ?
Plusieurs démarches ont été entreprises par les services compétents du ministère des Affaires étrangères en collaboration avec notre ambassade, nos missions consulaires en Italie et les autorités italiennes pour apporter des réponses et surtout des solutions à ce problème.
Compte tenu de l’importance que nous accordons à ce sujet et afin de répondre aux questions et aux sollicitations des familles, le gouvernement tunisien a envoyé, depuis le mois de janvier 2012, des représentants de ces mêmes familles en Italie. Notre ambassade à Rome ainsi que nos postes consulaires en Italie, avec l’appui financier de l’Office des Tunisiens à l’étranger et en collaboration avec les autorités italiennes compétentes, ne cessent d’apporter à ces représentants présents sur le sol italien le soutien logistique nécessaire pour leur permettre de visiter les centres d’accueil, de rétention et les prisons susceptibles d’héberger des Tunisiens en situation irrégulière. Nous les tenons régulièrement au courant de toute information nouvelle concernant ce dossier.
De leur côté, les autorités italiennes ont octroyé aux migrants tunisiens, à titre exceptionnel, 11236 titres de séjour provisoires pour des raisons humanitaires et parmi ces bénéficiaires, plus de 6.000 ont pu obtenir des titres de séjour après avoir bénéficié de contrats de travail et 4.617 ont bénéficié du décret n°109 du 16 juillet 2012 relatif à la régularisation des émigrés clandestins.
S’agissant de la question des disparus tunisiens au large des côtes italiennes, nous continuons de solliciter l’appui des autorités italiennes compétentes dans le cadre du déroulement des enquêtes conjointes pour parvenir à des résultats concluants qui contribueraient à apporter des réponses aux demandes insistantes des familles des disparus. En effet, une commission tunisienne  permanente a été instaurée en janvier 2012 lors d’un Conseil ministériel et a été chargée de ce dossier. Cette commission se réunit régulièrement sous la présidence du secrétaire d’Etat chargé de l’Emigration et des Tunisiens à l’étranger avec la participation de représentants des ministères des Affaires étrangères, de l’Intérieur, de la Justice et de la Défense nationale.
En même temps, les autorités tunisiennes ont adressé aux autorités italiennes 1.825 demandes relatives à la recherche de Tunisiens disparus ainsi que 232 relevés  d’empreintes digitales. Seules 14 empreintes digitales correspondant à des ressortissants tunisiens arrivés sur le sol italien avant la révolution ont été reconnues. Les recherches se poursuivent avec les autorités  italiennes en collaboration avec les services de l’Interpol  afin de connaître le sort des disparus et la possibilité de leur présence éventuelle  dans d’autres pays de l’Union européenne.
Nous comprenons et partageons la souffrance des familles concernées, et nous avons les mêmes soucis quant au sort de nos jeunes, mais il faut relativiser le bilan et reconnaître l’étendue et l’importance des efforts déployés par les différents intervenants tunisiens, y compris le MAE et ses structures internes et externes. Il n’y est de l’intérêt de quiconque de  ne pas clore ce dossier ou de rassurer définitivement toutes les familles. La question est complexe et ne dépend pas uniquement du rôle imparti au MAE ou aux organes de l’Etat tunisien.

La Tunisie a accédé au statut de partenaire privilégié de l’Union européenne en novembre 2012. D’aucuns affirment que notre pays, dont l’économie traverse une grave crise et la compétitivité de ses entreprises a été sérieusement entamée, est dans l’incapacité de tirer profit de ce statut. L’Europe n’a jusqu’ici montré aucune disposition sérieuse pour soutenir le développement de la Tunisie et appuyer son processus de transition vers la démocratie. Comment expliquez-vous cette attitude d’hésitation de l’Europe ?
Effectivement, la Tunisie s’est vue octroyer le Statut du partenaire privilégié de l’Union européenne en novembre dernier. A cet effet, les deux parties ont politiquement approuvé le texte du plan d’action qui traduit ce statut, lequel plan couvre une période de 5 ans : 2013-2017. Aussi, la Tunisie pourra-t-elle tirer pleinement profit de ce statut ainsi que des actions convenues dans le cadre du plan d’action. D’où, peut-être, la nécessité de nuancer les jugements des observateurs, qui prêchent souvent par excès de frilosité et ce, d’autant plus que l’actuelle situation économique du pays n’est pas catastrophique, mais difficile... et qu’elle finira par s’améliorer.
Quant au soutien de l’Union européenne au développement de la Tunisie et l’appui  à son processus de transition vers la démocratie, je ne partage pas le  constat qui prétend que l’Union européenne n’a jusqu’ici montré aucune disposition sérieuse à cet effet. Bien au contraire, au lendemain de la révolution, outre le soutien politique exprimé au plus haut niveau,  l’Union européenne a doublé son aide financière octroyée (sous forme de dons) à notre pays pour la période 2011-2013 pour atteindre les 400 millions d’euros. Cette enveloppe couvre non seulement des programmes d’appui budgétaire mais aussi des programmes de développement des régions défavorisées, d’appui à la compétitivité, d’appui à la gestion budgétaire par objectifs, d’appui à l’intégration, d’appui à la relance, etc. Au titre de 2012, le niveau de paiements a atteint un record historique  de l’ordre de 144,8 millions d’euros, soit une augmentation de 25% par rapport à 2011.
Par ailleurs, l’UE a fourni de l’assistance technique soit pour des institutions publiques (à l’instar de l’appui au processus électoral), soit au profit des ONG. Le montant alloué dans ce cadre est à concurrence de 6,5 millions d’euros.
Je voudrais réaffirmer que le partenariat de la Tunisie avec l’Union européenne demeure un choix stratégique et que notre premier partenaire a fait preuve d’engagement et de détermination à soutenir la Tunisie dans sa transition démocratique. Les perspectives de notre partenariat avec l’Union européenne ne peuvent être que prometteuses. Nous avons fait part récemment de notre vif souhait de voir la partie européenne augmenter substantiellement l’appui financier dédié à la Tunisie pour la période à venir et ce, afin de réunir les conditions idoines à même de contribuer et à la réussite de la transition démocratique et à la mise en œuvre des actions ambitieuses du plan d’action «Partenariat Privilégié».

La diplomatie tunisienne prévoit-elle s’ouvrir sur le Brics (organisation regroupant le Brésil, l’Inde, la Russie, la Chine et l’Afrique du Sud) qui détient 25% des richesses mondiales ?
Nous avons des contacts permanents avec ces pays émergents qui ont une nouvelle lecture des relations internationales d’autant que les cartes géostratégiques se sont brouillées. La Tunisie impliquée dans le groupe Afrique a été d’ailleurs conviée à la dernière réunion qui s’est tenue en Afrique du Sud.

Les Tunisiens considèrent que certaines représentations tunisiennes à l’étranger sont plutôt  au service des familles et des proches du régime au détriment des ressortissants tunisiens qui se plaignent souvent de ne pas trouver l’aide nécessaire en cas de besoin, qu’allez-vous faire pour changer ce jugement ?
Je crois qu’il y a lieu de relativiser ce constat, car si d’aucuns nient que l’image de la diplomatie et des diplomates tunisiens a été ternie par de tels agissements, il ne faudrait absolument pas généraliser ce jugement. Nombreux sont les diplomates qui ont été toujours animés par la volonté et la détermination de servir leur pays et ils l’ont fait... mais les pressions exercées auparavant, l’interférence et l’empiètement sur les prérogatives de nos représentations à l’étranger ont rendu leur tâche difficile. Il n’y a pas lieu non plus d’oublier que le département a souffert d’une négligence voulue par l’ancien régime, ce qui a causé des injustices dont les conséquences sont endurées jusqu’à nos jours par le personnel diplomatique et les autres catégories de fonctionnaires et agents. D’ailleurs, nous avons déployé de grands efforts pour remédier à ces situations d’injustices et de blocage au niveau des carrières de nos fonctionnaires et nous continuerons sur la même voie pour régler ces problèmes.
Aujourd’hui, la mission de chaque agent et fonctionnaire au MAE et de ses représentations à l’étranger est de changer le jugement négatif auquel vous vous référez... Le département  possède une vraie élite et des compétences qui doivent faire l’objet de la fierté de tout le pays. Nos jeunes avec leur enthousiasme et leur niveau éducatif avancé, nos anciens avec le lot d’expérience qu’ils ont pu cumuler, des agents de toutes catégories dévoués... tous sont conscients de l’importance du rôle du ministère  et de la lourdeur de la responsabilité.
Nous œuvrons  chaque jour à rendre ce département plus efficace et plus efficient, et de le placer à la hauteur de ses tâches et de sa mission. Les réformes internes que nous sommes en train de mettre en place, telles que le renfort des postes consulaires à la veille du retour de nos ressortissants au pays à l’occasion de la saison estivale, l’amélioration des services consulaires, les nouveaux mécanismes de gestion de la question de nos ressortissants en Syrie, etc.,visent à créer déjà un contexte favorable à la promotion d’une action réelle et active de la diplomatie tunisienne, notamment dans la protection, la sauvegarde et la défense des intérêts de nos concitoyens à l’étranger.
Les autres mesures que nous avons prises au niveau de l’amélioration  du cursus professionnel des diplomates sont incontestablement à l’actif d’une diplomatie tournée vers l’avenir et au diapason d’une Tunisie nouvelle en évolution constante vers un lendemain prospère.
Je rassure donc nos chers concitoyens que le mot d’ordre au MAE est l’intérêt national et la protection de nos ressortissants. Nous le faisons de par notre devoir et nous le faisons à l’abri de toute considération politique et dans la neutralité à laquelle tient tout le ministère.

Le syndicat de base de votre ministère vous reproche un manque de neutralité et de transparence dans les nominations et les promotions effectués, exigeant de mettre fin à la mission des conseillers de votre prédécesseur. Qu’en pensez-vous?
L’administration est à cent pour cent neutre, il n’y a pas d’interférence et d’aucune partie que ce soit. Nous sommes à égale distance avec tous les partis et  organisations de la société civile. Notre souci majeur est de servir les intérêts de la Tunisie dans toutes nos sphères d’appartenance: maghrébine, africaine et méditerranéenne.
Aujourd’hui, nous sommes en négociations avec le syndicat qui est impliqué dans la promotion de la carrière des diplomates sauf que l’application des décisions dans l’administration n’obéit pas au système «Push button», en raison de la lenteur des procédures administratives.
Au sujet des quatre conseillers, je vous informe que mon prédécesseur  a mis fin à leur détachement, ils sont sur le point de partir et ne participent à aucun centre de décision.

La succession d’évènements violents en Tunisie: manifestations de salafistes, attaques de l’ambassade américaine, de l’Ugtt, assassinat de Chokri Belaïd et les événements tragiques de Chaâmbi (Kasserine) ont réfléchi une image d’une Tunisie à la dérive. Que fait le ministère pour contribuer à améliorer l’image du pays notamment pour sauver la saison touristique, restaurer la confiance des opérateurs et soutenir les investissements ?
Face à la succession de ces évènements, le ministère n’a pas épargné ses efforts afin de rassurer nos partenaires concernant les défis auxquels fait face notre pays au cours de cette étape post-révolutionnaire assez sensible. En effet, le ministère a œuvré à la coordination des efforts des différents intervenants dans ce domaine et notamment les départements concernés, nos missions diplomatiques et consulaires et les structures tunisiennes d’appui à l’étranger (Tunisair, Fipa, Cepex, OTE...) afin d’assurer la promotion de l’image de notre pays à l’étranger, inciter les hommes d’affaires étrangers à investir en Tunisie et encourager la colonie tunisienne et nos compétences à l’étranger à consolider l’effort de développement en Tunisie. Il est certes rassurant que nos partenaires misent encore sur la réussite de la révolution tunisienne. A titre d’exemple, la signature, récemment, du contrat la conversion de la deuxième tranche de la dette avec la partie allemande prouve la confiance dont notre pays continue de bénéficier.
Restaurer la confiance de nos partenaires reste une œuvre globale et une responsabilité nationale qui incombe à toutes les parties : organes de l’Etat, société civile, partis politiques et même chacun de nous. Chaque citoyen a son rôle à jouer et a sa propre contribution à offrir pour présenter une image positive de la Tunisie. Aussi, les efforts diplomatiques doivent-ils être accompagnés par des avancées concrètes  au niveau des questions nationales prioritaires et consolidées par un consensus national qui reflète l’unité de notre pays et donne ainsi l’image d’une Tunisie qui réussit son processus transitoire.
Le capital sympathie de la Tunisie est resté intact. Notre pays a eu le mérite de faire cette révolution, mais vous savez que toute révolution passe par des phases de crise.
La Tunisie n’a pas beaucoup de moyens pour se maintenir aux plans économique et social et les réponses ne peuvent être toujours immédiates. C’est pourquoi nous œuvrons sur la scène internationale et convions  nos partenaires à venir  sur place afin de  vérifier par eux-mêmes que globalement le pays est loin d’être une poudrière.
Le monde entier désire que notre  révolution réussisse sauf que cette période transitoire est accompagnée de nombreux défis politiques (élections) et socioéconomiques. Il existe des facteurs exogènes qu’il faut juguler, c’est la raison pour laquelle l’Etat, les partis politiques et la société civile font face à tous ces défis qu’il faut relever. En dépit de tous les problèmes et les chocs survenus, la Tunisie est en mesure de réussir sa transition grâce à l’ingéniosité des Tunisiens, le crédit sympathie dont  dispose le pays, une administration solide et performante et une société civile agissante et vibrante.
Auteur : Entretien conduit par Samira DAMI et Nejib OUERGHI

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Trois questions à : Moëz Bouraoui, président de l’Atide

Elections avant 2013 : c’est jouable

 • Le comité de sélection des candidats de la nouvelle Isie se conformera à la décision du tribunal administratif
L’Atide (Association tunisienne pour l’intégrité et la démocratie des élections) a appelé, hier, dans un communiqué parvenu au journal, au respect de la décision du tribunal administratif concernant l’arrêt des travaux du Comité pour la sélection des candidatures à l’Isie (Instance supérieure indépendante des élections). Décision rendue le mardi 14 mai 2013 suite à une requête déposée par un groupe de 28 avocats «qui se sont opposés, d’une part, aux critères adoptés par le Comité de sélection des candidats et, d’autre part, à la décision de prolonger le délai de soumission des dossiers de candidature».
L’Atide considère que «la décision du tribunal administratif est souveraine, légale et ne peut être, en aucun cas,  sujette à une quelconque interprétation… et appelle à l’application de cette décision pour renforcer l’indépendance de la justice administrative ainsi que pour assurer la neutralité et la transparence au niveau de la composition de la nouvelle Isie».
Rappelons que Moëz Bouraoui, président de l’Atide, a critiqué, à plusieurs occasions, différents aspects du travail du comité de sélection des candidats, principalement en ce qui concerne les critères d’évaluation des candidats tels qu’adoptés par ce comité. Pour en savoir plus sur les critiques et l’avenir de l’échéancier électoral, La Presse a posé 3 questions au président de l’Atide.

Que reprochez-vous en substance aux critères d’évaluation adoptés par le comité de sélection de l’Isie ?
Les critères d’évaluation du comité de sélection de l’Isie sont peu équitables, incompréhensibles, voire insensés. Car comment expliquer que les critères varient d’une catégorie professionnelle à l’autre, selon que l’on soit avocat, magistrat, universitaire ou autres.
La grille d’évaluation prend en compte quatre critères : les catégories d’âge, le diplôme, l’expérience professionnelle et l’expérience en matière électorale. Comment expliquer, encore une fois, que le coefficient attribué au diplôme est de 2 points alors que pour les autres critères, ce coefficient n’est que d’un point ? Ce qui a poussé plusieurs anciens de l’Isie à se retirer.
Le système de notation étant discriminatoire, 28 avocats ont présenté une requête au tribunal administratif qui a décidé l’arrêt des travaux du comité pour la sélection des candidatures à la nouvelle Isie et cette décision est juste à 100%. Donc la grille d’évaluation tombe à l’eau, le tribunal ayant demandé la révision de l’ensemble de la grille d’évaluation régie par un arrêté du président de l’ANC du 20 février 2013. Pis, avant, la sélection des 98 candidats par le comité de sélection comportait plusieurs candidats ex aequo et certains parmi eux n’ont pas compris pourquoi ils ont été exclus alors qu’ils étaient bien placés. A un ancien candidat de l’Irie (Instance régionale indépendante des élections) qui était le mieux placé parmi six candidats ex aequo, le comité de sélection a répondu qu’ils ont favorisé les plus jeunes.
D’autres candidats ont été sélectionnés alors qu’on s’est rendu compte que leur allégeance partisane est des plus claires et qu’un candidat était même inculpé dans une affaire d’escroquerie et nous en avons les preuves.
A un autre candidat, un avocat, également éliminé, le comité de sélection a répondu qu’il a favorisé les candidats les plus âgés. C’est à n’y rien comprendre.
Vous voyez donc que l’enjeu politique a pris le pas sur la neutralité et la transparence.

Quelle est la réaction du comité de sélection des candidats à la nouvelle Isie à l’égard de la décision du tribunal administratif ? La prendra-t-il en compte?
Dans une réunion ayant regroupé hier  le président de l’Assemblée nationale constituante (ANC), Mustapha Ben Jaâfar, et le comité de sélection, il a été décidé que ce dernier se conformera à la décision du tribunal administratif. Le comité de sélection n’a pas le choix car il peut être suivi pénalement par le tribunal administratif.

Comment voyez-vous l’avenir de l’échéancier électoral, les élections sont-elles réalisables avant la fin de l’année 2013 comme cela a été annoncé ?
Si d’ici le 1er juin 2013, l’Isie est créée et ses neuf membres  sélectionnés, on arrivera largement à réaliser les élections avant la fin de 2013. Et c’est jouable parce que nous avons un prérequis alors que pour les dernières élections, le tableau était vierge.
L’Isie dispose de locaux, de procédures, d’une banque de données et autres, ce qui nous fera gagner au moins trois à quatre mois. Nous n’aurons plus besoin, donc, de huit mois comme cela a été le cas lors des dernières élections.
De toutes les façons, le pays ne peut plus supporter plus de temps d’attente vu la situation économique, sociale et sécuritaire. A mon avis, les élections seront bel et bien transparentes si le conseil de l’Isie est neutre et objectif.
Il s’agit, au final, d’une question d’intérêt général. C’est pourquoi tout le monde doit œuvrer pour que les prochaines élections soient les plus intègres et neutres possibles. La loi électorale sera fixée le 1er juillet 2013 mais rien n’empêche que dès à présent on ouvre les bureaux d’inscription.
Auteur : Propos recueillis par Samira DAMI
Ajouté le : 16-05-2013