vendredi 17 mai 2013

Dialogue nationalÇa passe ou ça casse

 Malgré les déclarations optimistes sur un consensus annoncé par Mouldi Riahi, avant-hier, lors du quatrième round du dialogue national, il semble que ce dernier bat de l’aile. 
Les principaux points d’achoppement consistent dans les choix du régime politique (présidentiel,  parlementaire, mixte) et les prérogatives dévolues au président de la République et au chef du gouvernement. 
Certes, tout le monde réclame à ce niveau un régime hybride, équilibré, entre les deux têtes de l’exécutif loin de toute monopolisation et la prééminence de l’un aux dépens de l’autre, mais les protagonistes n’arrivent pas à se mettre d’accord sur les prérogatives de ces derniers. 
D’autres questions continuent à faire débat telles que le seuil de voix à obtenir pour être représenté à l’Assemblée nationale, le nomadisme parlementaire, la nationalité du président, le parrainage par le corps des grands électeurs, etc. 
Afin de présenter à nos lecteurs de plus amples éclairages sur toutes ces questions, nous avons approché Nizar Nsibi, membre du bureau politique d’Al Aridha, Mohamed Bennour, porte-parole d’Ettakatol, et Adel Omrani, membre fondateur de l’Alliance démocratique. Regards croisés.

Mohamed Bennour (porte-parole d’Ettakatol) : « La pierre d’achoppement : les prérogatives du président »
Les discussions ont avancé et abouti aujourd’hui à la délimitation des points de convergence et de divergence. 
Les points de convergence concernent la nature du régime politique, tous les partis ont opté pour un régime politique mixte. 
Concernant l’élection du président, tous se sont accordés pour le suffrage universel. Autres convergences : le président n’a pas les pleins pouvoirs de nommer les ministres ou de les limoger. Il ne peut dissoudre l’Assemblée nationale qu’en cas d’échec de constitution d’un gouvernement, et ce, sur avis de la Cour constitutionnelle.  
Les points de divergence concernent certaines prérogatives du président de la République. Tous les partis, à l’exception d’Ennahdha, sont d’accord pour que le président de la République préside le Conseil des ministres et le conseil de sécurité. Les Affaires étrangères et la Défense relèvent de ses attributions. Il nomme les ambassadeurs après consultation de la commission parlementaire concernée ainsi que les hauts fonctionnaires de l’Etat. 
Or Ennahdha propose que le président ne puisse faire de nominations, dans les domaines de la Défense et des Affaires étrangères, que sur proposition du chef du gouvernement.   
Pour débloquer la situation, le Conseil de la Choura d’Ennahdha se réunira dimanche prochain afin de fournir une réponse sur toutes ces convergences. S’il y a accord et concessions les réunions du dialogue national reprendront lundi prochain, sinon c’est l’échec et la fin du dialogue national.
Concernant les autres questions : le nomadisme parlementaire sera interdit par la Constitution ou par la loi. Pour la nationalité, le président doit être Tunisien, s’il a une double nationalité, il doit abandonner sa deuxième nationalité.
Quant au principe du parrainage il est retenu, le seuil des restes des voix a été fixé à 5%. Autrement dit si un parti n’atteint pas les 5%, il ne bénéficiera pas des restes des voix. Et ce dans le but d’éviter la dispersion des voix.

Nizar Nsibi (membre du bureau politique d’Al Aridha) : « Ça bloque sur la nature du régime politique »
Le dialogue national a achoppé sur la nature du régime politique. Contrairement au reste des partis participants qui sont en faveur d’un régime politique mixte et équilibré, Ennahdha veut instaurer un régime parlementaire où le président n’a pratiquement pas de prérogatives à l’exception des Affaires étrangères et de la Défense. Tout le reste, notamment les affaires internes, relèverait du chef du gouvernement, même concernant les nominations dans les secteurs de la défense et de la politique étrangère, puisque le président n’aurait pas les attributions pour le faire. C’est le chef du gouvernement qui proposerait les nominations et au président d’accepter ou de refuser. Le président ne présiderait pas non plus le Conseil des ministres.
Il s’agit donc, là, d’un régime politique à la manière du Portugal où la fonction de président est formelle et où le président n’est qu’une marionnette. 
Aziz Krichen, conseiller du président, a insisté sur l’échec du régime parlementaire, tel que pratiqué aujourd’hui ; le président étant isolé. Ainsi, il semble qu’Ennahdha veut réitérer le régime politique actuel dominé par le chef de l’exécutif. Or, le pays a besoin d’un régime politique mixte et d’un vrai parlement pour contrôler le président de la République.
Nous voulons un président qui ait un poids et non une simple représentation et une image sans prérogatives aucunes. Si on ne se met pas d’accord sur la nature du régime, ce sera l’impasse. Entretemps, Ennahdha a demandé à consulter le Conseil de la Choura. Je crois que les nahdhaouis seront obligés de faire des concessions mais ils laissent faire le temps pour présenter le moins de concessions possibles. Car, il faut qu’on sorte avec un résultat avant de participer au dialogue national proposé par l’Ugtt qui se déroulera au mois de mai. Les réunions du dialogue reprendront lundi prochain si Ennahdha accepte les concessions demandées par le reste des partis.
Propos recueillis par Samira DAMI

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire