vendredi 17 mai 2013

projet de loi organique sur l'immunisation politique de la révolution


les familles politiques enrichissent le débat 

Hamma Hammami (porte-parole du Front populaire) : «L’immunisation ne peut se faire que dans le cadre de la justice transitionnelle» 
Pour le Front populaire, la meilleure manière, juste et efficace, pour «protéger» la révolution réside dans la réalisation de ses objectifs. Ce que le parti Ennahdha et ses alliés ne sont pas en train de faire.
Comment peuvent-ils alors prétendre vouloir «immuniser» la révolution alors que dans la réalité, et à travers leurs pratiques, ils s’opposent à la réalisation des objectifs de la révolution, en entravant, par exemple, aussi bien la réforme des appareils sécuritaire et judiciaire que ceux de l’administration et des médias. Je pense, donc, que son seul objectif est de noyauter l’appareil de l’Etat afin de l’instrumentaliser.
 Ennahdha n’a rien fait pour les classes populaires qui sont le moteur de la révolution. Pis, elle a suivi les mêmes choix   économiques et sociaux ultralibéraux de Ben Ali. Elle continue à appauvrir les masses populaires, en même temps, elle encourage la violence contre les forces démocratiques et progressistes et traîne en longueur avant d’achever la Constitution. Comment avec de telles pratiques et un tel résultat la Troïka peut se targuer de vouloir «immuniser» la révolution alors qu’elle est en train de la faire avorter en vue de mettre sur pied une nouvelle dictature.
La position du Front populaire concernant l’immunisation de la révolution est claire : il ne s’agit pas d’exclure les Rcédistes et autres collaborateurs du régime de Ben Ali en bloc, mais de régler la question dans le cadre de la justice transitionnelle. Autrement dit, seuls ceux qui ont enfreint la loi à travers le vol, la corruption, la torture ou autres pratiques criminelles doivent être jugés par la justice.
D’autre part, je me demande, à la lumière du projet portant sur l’immunisation de la révolution, si la Troïka veut vraiment organiser des élections et achever la deuxième étape de la transition dans les plus brefs délais, alors que l’Isie (Instance supérieure indépendante des élections) qui doit mettre tout ça en pratique n’est même pas constituée.
Bref, pour mettre en application une telle loi et organiser les élections, il faudrait attendre jusqu’en 2014 ou même 2015. Car, il faut d’abord établir la liste des exclus et attendre, ensuite, les recours en justice. Tout ça va prendre un temps fou.
Ainsi, pour le Front populaire, l’immunisation de la révolution ne peut se faire qu’en mettant en pratique la justice transitionnelle. Mais Ennahdha et ses alliés sont-ils prêts et ont-ils la volonté d’enclencher le processus de la justice transitionnelle ? That is the question !

Samir Taïeb (porte-parole d’Al Massar) : «Tout ça ne cacherait-il pas un désir obscur de reporter les élections ?»
Le parti Al Massar considère que l’immunisation de la révolution devrait se faire dans le cadre de la justice transitionnelle. Samir Dilou, le ministre des Droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle, lui-même, a déclaré que la loi sur l’immunisation politique de la révolution peut être insérée dans le projet de la justice transitionnelle.
Mais, visiblement, on veut saucissonner la justice transtionnelle en consacrant des  listes pour les hommes politiques, d’autres pour les juges, les avocats, les fonctionnaires, etc. Un vrai casse-tête chinois qui ne peut aboutir qu’à l’injustice et l’instrumentalisation politique.
Ça tourne même au règlement de comptes fondé sur des considérations politiciennes en vue des prochaines élections, alors que beaucoup se sont infiltrés au sein du parti Ennahdha à la recherche d’une impunité.
Or, le projet de justice transitionnelle préparé par Samir Dilou est de bonne teneur et perfectible. On devrait en rester là car ce projet englobe tous les aspects de l’immunisation de la révolution et, de plus, il ne perturbe, en aucune manière, le processus démocratique et l’organisation des élections.
Ce qui est incroyable, c’est que le patron d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, a déclaré que «la priorité est à la justice transitionnelle». Mais c’est le contraire qui se passe à l’Assemblée nationale constituante, puisqu’on est en train de discuter le projet de l’immunisation de la révolution avant celui de la justice transitionnelle, fin prêt depuis deux mois.
Laissez-moi vous dire que la discussion, le vote et la mise en pratique du projet d’immunisation de la révolution sont très difficiles. Les constituants vont être submergés de travail et ça retardera tout le processus démocratique. Ce qui va susciter la colère des citoyens qui s’en prendront encore une fois aux députés.
Le projet d’immunisation touche des milliers de personnes et il faudra un temps énorme. Car ça enclenchera des procédures et des recours judiciaires qui peuvent durer des mois, voire des années.
Si ce projet est adopté, et normalement les 109 voix d’Ennahdha et du CPR sont garanties, le processus démocratique sera déréglé et perturbé. Qui vous dit que tout ça ne cache pas un désir obscur de la part de ceux qui ont présenté ce projet d’immunisation de la révolution afin de reporter les prochaines élections ?
Propos recueillis par Samira DAMI
Ajouté le : 04-04-2013

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